mercredi 18 novembre 2015

L'art dans la peau

La peau est une surface qui délimite un corps. Elle est souvent le support de signes, de traces, de sens, de motifs qui affirment une identité, une histoire, une singularité. C'est un matériaux sensible sur lequel on peut intervenir de façon éphémère ou définitive.

1960, date clé, c'est la libération sexuelle. Elle a permis au corps humain de devenir un champ d'investigation pour de nombreux artistes contemporains. Cela permet d'explorer un nouveau genre, la performance. Des artistes se mettent eux-même en scène et utilisent leur corps comme matériaux de leurs œuvres. Certaines de leurs propositions peuvent être parfois violentes, critiques, politiques, revendicatrices, expérimentales. Ils mettent en avant la dimension sociale, politique, mécanique, sexuelle du corps qui devient un objet manifeste…

À vous d'en juger..

Anne-Sophie FLORES, Marine GUY


La peau support de motifs, de culture, d'identité

PEUPLES DE L’OMO, LES ARTS PREMIERS DANS LA PEAU



Hans Silvester, série "peuple de l'Omo", 2006

A l’est de l’Ethiopie, dans la vallée de l'Omo, vivent des peuples au mode de vie ancestrale. En effet, ces communautés perpétuent la tradition de peintures corporelles depuis des siècles ; ils font de leurs corps de véritables œuvres d’art. Cette peinture vient de la terre, et accompagnée de pigments végétaux, leur offre 4 couleurs pour élaborer leurs "tableaux vivants" : Rouge, ocre jaune et blanc. Ils dessinent alors du bout des doigts, ou parfois à l’aide d’un bout de bois ou un roseau. Leurs gestes sont spontanés, vifs, rapides, et c’est de ce geste qu’on obtient un mouvement essentiel, originel, qui n’a rien à envier aux grands maitres de la peinture.


Hans Silvester, série "peuple de l'Omo", 2006
Cette tradition permet à chacun de garder son identité, de l’affirmer, de s’exprimer. Le corps est alors le meilleur support pour extérioriser son âme, ses émotions. De plus, souvent, le corps s’enrichit d’une coiffure singulière, qui peut être élaborée à base de végétaux, de plumes ou de tout autre ornement piqué dans les cheveux retenus par de l’huile ou de l’argile. C’est donc toute la nature qui s’invite sur les corps, qui devient parure, qui nourrit cet "art premier". Cependant, cet art, n’est pas simplement destiné à être apprécié par son artiste, en effet, ils peignent pour l’autre, pour partager, pour se montrer, pour déployer leur adresse.
Hans Silvester, série "peuple de l'Omo", 2006
Et c’est ainsi, qu’après chaque bain dans la rivière, ils réinvente de nouveaux tableaux, posent cette encre sur leur peau et laissent libre cours a leur imagination.

Solenne GLOUX




IRINA IONESCO, RENCONTRE INSOLITE AVEC LA MAFIA

Irina Ionesco,Le Japon interdit, 1996


Irina Ionesco est une artiste contemporaine, née en 1935 à Paris et d'origine roumaine. Son œuvre est très célèbre, surtout son travail photographique autour des femmes qu'elle fait poser dans des univers théâtralisés et souvent proche de l'érotisme. Cependant, une des œuvres célèbres de l'artiste est un reportage photographique réalisé en 1996 lors d'un voyage à Tokyo présentant des photos d'hommes. Partie au Pays du soleil levant pour y photographier des Geisha, des Sumo et des modèles japonais, elle aura finalement l'opportunité de rencontrer les membres de la mafia la plus en vogue de la capitale: les Yakuzas. Ceux-ci l'inviteront dans un hôtel luxueux équipé de bains traditionnels japonais où l'on se baigne nus et accepteront de bon cœur de se faire photographier. Ces hommes exposeront alors leurs tatouages à l’artiste et poseront librement une journée durant. Cette rencontre restera pour Irina Ionesco improbable et unique et donnera naissance à un livre présentant les photos prises durant cette journée qui sera édité en 2004 : "Le Japon interdit".

Louise ROUSSIÈRE


LE CORPS COMME MÉDIA D'ABOLITION DES NORMES


Jean-Luc Verna, est né en 1966 à Nice. Il est un dessinateur, sculpteur, photographe, performeur et musicien. Il vit et travaille à Paris maintenant.

Jean-Luc Verna est un artiste polymorphe, sa pratique incluant la photographie, la sculpture, ou encore la performance, et formant un ensemble cohérent « autour du corps, de son propre corps, piercé et maquillé. » Son travail mêle l'histoire de l'art à la musique rock et underground. Siouxsie Sioux, sa muse, a changé sa vie le jour où il la vit pour la première fois à la télévision dans l'émission Mégahertz d'Alain Maneval alors qu’il était adolescent. Depuis 1995 jusqu’a 2013, Il a organisé cinq expositions personnelles intitulées « Vous n’êtes pas un peu beaucoup maquillé » à la galerie "Air de Paris". Il a aussi participé à nombre d’expositions collectives avec d'autres artistes contemporains. Son corps est recouvert de tatouages, participant à son œuvre.


Jean-Luc Verna, Dans mes bras, co-production Maison Causse, 2012
Jean-Luc Verna,OK/OKAY, Swiss Institute and Grey Art Gallery, New York, 2005


A mon avis, Jean-Luc Verna est un artiste polymorphe, qui mêle photographie, musique, dessins, tatouage… Son art s'inscrit dans sa vie, dans sa peau. Ses tatouages sont sa caractéristique particulière. Il utilise l’art dans sa peau pour vivre son univers.

Xiaoyu TANG


La peau blessée



BLESSURES, CICATRICES, TRACES DU PASSÉ

Sophie Ristelhueber, Every One#14, 1994

Le travail de Sophie Ristelhueber intitulé Every One s’inscrit parfaitement dans cette thématique de l’art dans la peau. Cette plasticienne et photographe française s’intéresse (dans cette série de 14 clichés en noir et blanc) aux cicatrices.
Les patients d’un hôpital parisien sont ses modèles, mais ce ne sont pas les personnes qui l’intéressent, uniquement leur cicatrice. On ne reconnait en effet pas les patients photographiés puisque Sophie Ristelhueber a pris le parti d’un gros plan avec un cadrage précis de la zone cicatrisée. A travers cette approche, l’intérêt de l’artiste pour les cicatrices apporte une véritable valeur de mémoire des traumatismes, illustre cette trace « indélébile ».
Ses travaux antérieurs davantage axés sur le territoire, sont également orientés autour de la réparation, de la reconstruction. On pourrait donc assimiler ces dos et visages à des paysages ou architectures, ils sont comme une allégorie de la guerre, de ses blessures et de ses cicatrisations.

Sophie Ristelhueber, Every One#8, 1994


Élise BUNOUF


BLOOD SCRIPT, L'OEUVRE ENGAGÉE DE MARY COBLE


Mary Coble, Courtesy Conner Contemporary Art, 2008

Mary Coble est une artiste originaire des États-Unis et qui s'est installée en Suède. Cette artiste féministe produit des œuvres très engagées et les utilise pour dénoncer les injustices de notre société actuelle, principalement les discriminations envers les femmes et les homosexuels. 


Mary Coble, Courtesy Conner Contemporary Art, 2008


Dans cette œuvre intitulée « Blood Script » (que l'on peut traduire par écriture sanglante), l'artiste s'est fait tatouer à l'aide d'une encre invisible 75 insultes sexistes ou homophobes sur la presque totalité de son corps. Après chacun de ces tatouages, elle a soigneusement recueilli l'empreinte de sang qui s'en échappait pour garder une trace de ces écritures. Cette œuvre provocatrice et pouvant choquer certaines personnes a une symbolique très forte. L'artiste étant elle-même homosexuelle, elle a subi de nombreuses fois ces insultes et les a vécus comme une blessure. Elle a donc symbolisé la violence de ces propos homophobes à l'aide de ces tatouages que l'on peut considérer comme des mutilations. Elle garde donc de cette œuvre des cicatrices quasiment invisibles et une série de feuilles marquées de son sang.

Pierre-Yves LASCOLS


PERFORMANCES EXTREME


Chris Burden incarne dans les années 70 la frange la plus extrême du body art, emblème d’une contre culture qui succède d'une décennie l’art minimal… Shoot , réalisé en 1971 dans la galerie d’art de Santa Ana en Californie, est l’une de ses plus étonnantes performances. Il demande à un complice situé à moins de deux mètres de lui tirer dessus au 22 long rifle pour érafler son bras, « Pendant un moment j’étais un sculpture » (ndlr Chris Burden).

Chris Burden, Shoot, 1971


Cette performance fait échos au combat du Vietnam. Il a voulu dépeindre la réalité de la douleur au monde, à une société devenue insensible à la violence montrer dans l’imagerie des médias.

Shoot est qualifiée de polémique, provocatrice, il s’agit d’une performance éclair qui crée une situation d’inconfort pour les spectateurs tiraillés entre l’injonction de prêter assistance à une personne en danger et l’interdiction de toucher des œuvres d’art.

L’idée du danger personnel en tant qu’expression artistique est centrale. En ce prêtant lui même au jeu, il explore la nature de la souffrance en endurant des situations extrêmes.


Chris Burden, Vidéo de la performance Shoot

Delphine MAZIOL



AU-DELÀ DE LA CHAIR


Gina Pane, Action Sentimentale, 1973
Gina Pane, Action Sentimentale, 1973


A la sortie de ses études aux Beaux-Arts de Paris, Gina Pane utilisait pour son art des matériaux traditionnels. Sa peinture et sa sculpture se rapprochaient assez du Suprématisme. C’est seulement quelques années plus tard que l’artiste se lança dans le body-art, les matériaux changèrent, pour devenir objets de blessure aussi bien agressifs qu’enfantins.Gina Pane joua sur ce contraste entre l’agressif et l’agréable, avec l’utilisation de fleurs par exemple (matériau naturel et bénin), comme dans sa performance Action Sentimentale de 1973, où elle mêlait aussi bien l’image douce de la rose à celle de ses épines pour se les planter dans le bras, elle dessinait alors une sorte de tige sur son bras et incisait la paume de sa main à l’aide d’une lame de rasoir afin d’évoquer les pétales.La blessure constitue une part fondamentale de ses actions. Exposer sa chair, son sang, sa matière organique écorchée, c’était exposer ses revendications, faire parler et faire vivre son art.Avec son corps, l’artiste utilise un moyen d’expression qui lui est propre, mais que tout spectateur comprend, sans besoin de connaissances particulières, car ce langage fait aussi appel à son propre corps.
Maxime ROUSSET





TRACÉ D’UN TRAIT LA RÉALITÉ


Santiago Sierra est un artiste espagnol, né à Madrid en 1966. Il vit au Mexique depuis 1998. Ce pays est la source de son inspiration. Il dénonce la mondialisation, les inégalités Nord/Sud dues au capitalisme corrompu et l’exploitation de l’homme par … l’homme.

Santiago Sierra, Ligne de 250 cm, 1999


Santiago Sierra a réalisé en 1999 une ligne de 250 cm tatouée sur le dos de six jeunes cubains de La Havane. Santiago a rémunéré ces jeunes hommes 30$ pour les "marquer". L'artiste souhaitait montrer que cette ligne pouvait être infinie. Ce tatouage aurait donc pu atteindre des milliers et des milliers de kilomètres car la société ne permet pas à ces habitants de vivre mais plutôt de survivre. Pour cela ils sont prêts à se mutiler le corps. Santiago montre ici que les jeunes cubains n’ont pas de limites pour gagner de l’argent. Il justifie sa démarche en disant « Le tatouage n’est pas le problème. Le problème est l’existence de conditions sociales qui me permettent de faire ce travail. » Un an plus tôt il avait réalisé un trait sur le dos d’une personne. Celle-ci n’avait pas de tatouage, n’en désirait pas mais elle le faisait par nécessité. L’artiste la rémunéra 50$. Santiago révèle une société prête à tout pour survivre jusqu’à la mutilation de son corps tout en pôsant des questionnements sur l'éthique de l'art et de l'artiste.

Pétronille MAICHE




La peau revendique, joue, provoque…

L’ART DANS LA PEAU

Marcel Duchamp, avant-gardiste de la performance ?

Marcel Duchamp, tonsure, 1919
C’est dans un acte non-prémédité que Marcel Duchamp ouvre la voie à ce qu’on appelle la performance. 
C’est en 1919 qu’il se laisse photographier par Man Rayn après s’être tondu le crâne pour dessiner dans ses cheveux la forme d'une comète : hommage à la blessure d’Apollinaire ? Geste dada, incité par une infestation de poux ? Rapport à l’œuvre de «l’Enfant-phare » ? Clin d’oeil à l’anticléricalisme? Qui le sait vraiment ?Cette photographie permet de comprendre qu'il est un individu qui a décidé sans le savoir mais en le faisant, de faire de sa vie une œuvre, une performance avant que d'être un artiste au sens traditionnel du terme.

Marine CORRÉ




PEINTURLURAGE DU VISAGE - LARIONOV

Larionov, Le peinturlurage du visage, 1913


« Nous avons lié l'art à la vie. Après un long isolement, nous avons appelé la vie à voix haute et la vie a envahi l'art ; il est temps que l'art envahisse la vie. Le peinturlurage du visage voilà le commencement de cet envahissement... »

Larionov et Zdanévitch manifeste : Pourquoi nous nous peinturlurons. 1913

Mikhail Larionov (Tiraspol 1881-Fontenay-aux-Roses 1964) était un peintre et décorateur d'origine russe. Inventeur du Rayonnisme, avec son épouse Nathalie Gontcharova ils créent en 1912 un nouveau genre pictural, celui de l'illustration d'œuvres poétiques. Un travail où l'écriture et la peinture sont mis en relation tel une libération du mot et de la forme.

L'art populaire fortement présent en Russie à cette époque permet de comprendre cette volonté de faire fusionner l'art et la vie. Les avants-gardes dont Larionov est le précurseur revendiquent le droit d'inclure l'art dans la vie. C'est pour cela que Larionov accompagné de son ami David Bourliouk se sont promenés dans les rues de Moscou le visage barbouillé de peinture. La Peinture peut rendre ambiguë l'identification et les émotions d'une personne. C'est une nouvelle forme de langage.

Céline VÉPA


LE CORPS COMME MEDIA D’ABOLITION DES NORMES

Gunter Brus - Balade, A Vienne, juillet 1965

L’actionnisme Viennois est un courant artistique du XXème siècle, essentiellement orienté vers l’art de la performance. Dans les années 60-70, Otto Muehl (1925-2013), Hermann Nitsch (1938) et Günter Brus (1938), tous trois fondateurs de ce mouvement, sévissent dans l’Autriche bourgeoise et puritaine d’après-guerre, où plane un sentiment de culpabilité causé par la coopération du pays avec l’Allemagne Nazie en 38.

Ces trois artistes utilisaient particulièrement le corps, à la fois comme sujet peintre, ustensile de peinture et objet peint, comme dans l’œuvre de Günter Brus intitulée Promenade à Vienne.

Gunter Brus Balade, A Vienne, juillet 1965


Dans cette performance, l’artiste se peint intégralement en blanc et se dessine une trainée noire, du haut du visage au bas de la jambe droite, avant d’aller déambuler dans les rues de Vienne et de s’y faire verbaliser par le premier policier venu croiser son chemin. Cette œuvre choque particulièrement à une époque où les œuvres ne se trouvent que dans les musées que les activistes comparent à « des cimetières de l’art ». La démarche de Brus consiste à replacer l’art dans le réel, en proposant un médium de peinture inédit – le corps – et en s’exposant publiquement de manière provocatrice, allant ainsi à l’encontre des règles de bienséance conservatrices et étouffantes qui régissent le quotidien de la société Viennoise de l’époque.

Nicolas BLUTEAU




ANNETTE MESSAGER « TRUQUEUSE », OU LA MISE EN SCENE DU CORPS


Annette Messager, La femme est l’homme et La femme et le barbu d’Annette Messager, 1975


Annette Messager, une artiste française contemporaine. Ses œuvres suscitent un mélange d’attraction et répulsion, via des thèmes tels que l’enfance, la fragmentation, la femme dans la société…

Son parcours a la particularité de se décomposer en plusieurs cycles, où elle se présente comme "artiste", puis "collectionneuse", "femme pratique", "truqueuse", et enfin "colporteuse".

En 1975, elle fait éditer un recueil intitulé "La femme et… ", dans lequel on trouve une série de photographies retouchées ou maquillées, où l’artiste met en scène son corps. Elle y fait apparaître des personnages, des éléments internes (un fœtus, son système digestif…) ou externes à son corps (araignées, bijoux…) Elle joue de cette manière avec les stéréotypes associés à la femme et son rapport à l’homme.
Annette Messager, Trophées, 1986
En 1986, elle réalise une nouvelle série: Trophées. Sur des morceaux de corps photographiés et souvent agrandis émerge un monde merveilleux rappelant le monde de l’enfance. On peut y voir un lien entre les lignes de la main, l’histoire de notre vie qui y serait inscrite, et les dessins, narratifs, presque tatouages, poétiques, évoquant des mondes personnels.
Annette Messager, Trophées, 1986


Dans ces photographies retravaillées au fusain et à l’aquarelle, les dimensions, (entre 50 et 100 cm) participent à rendre ces détails anatomiques monumentaux, des fragments d’un tout qui, isolés, nous appellent à les célébrer. D’ailleurs, cette ornementation corporelle n’est pas sans rappeler les tatouages au henné (mehndi) pratiqués par des femmes de façon plus ou moins symbolique.

" Faire de l’art, c’est truquer le réel. "

Marie MOTTE


UNE OREILLE POUR ETRE ECOUTE EN PERMANENCE, STERLAC

Stelarc, Event For Rock Suspension, Tamura Gallery, Tokyo, 11 May 1980


Sterlac est un artiste australien. Il se fait connaître dans les années 70 avec ses performances, où il se suspendait au-dessus du sol à l'aide d'hameçons planté dans sa peau. Puis dans des performances mêlant expérimentations et technologies, portant réflexion sur la question de l’humanoïde, du post-humain, du corps robotiquement assisté. Pour cet artiste, les technologies ne sont pas au service de l'homme, mais c'est à l'homme de se fondre en elles. Le corps humain, qu'il considère obsolète, disparaîtra selon lui au profit d'un vaste réseau de neurones interconnectés.

Sterlac, Extra Ear, 2015

C'est en août dernier qu'il a présenté "Extra ear " un projet sur lequel il travaillait depuis près de 15 ans, à savoir l'implantation d'une troisième oreille dans son bras. Celle-ci a été developpé grâce à une structure en biopolymère implantée par chirurgie. L'idée étant de permettre aux internautes de pouvoir entendre ce que perçoit son oreille, via internet. Il devait pour cela y implanter un micro connecté par bluetooth. Mais malheureusment une infection sérieuse l'a obligé à enlever le micro.


Sterlac, Amplified Body, Laser Eyes & Third Hand, 1986


Jérôme BOISSIÈRE


LA CONSOMMATION DANS LA PEAU


Dietrich Wegner, Cumulous Brand, Sabine Sitting UpInkjet print, 2012

L'artiste australien, Dietrich Wegner, a réalisé en février 2012 une série de photos et de sculptures intitulée "cumulus brand". On y retrouve des bébés recouverts de faux tatouages de grandes marques. Il avait précédemment réalisé d'autres oeuvres autour de l'univers de l'enfant.

Dans cette nouvelle série, il met en avant la place de l'enfant dans la société de consommation et son devenir. Ces œuvres semblent choquantes donnant l'image de vrais tatouages sur des bébés. En effet, se faire tatouer est un acte fort, c'est une marque à vie. Ici, il porte un regard caustique et critique sur la publicité qui envahit notre espace intime dès le plus jeune âge. Il recouvre le corps nu des bébés de grandes marques, notamment pour enfants, telles que "Walt Disney","Lego" afin de montrer l'impact de la surabondance de publicités sur les enfants. Comme le tatouage, la pub nous marque.

En réalité, ce ne sont que des retouches photoshop ou des sculptures en silicone.


Dietrich Wegner, Cumulous Brand, Sabine Sitting UpInkjet print, 2012

En outre, il dénonce cet excès d'informations qui influe sur notre développement individuel et le fait évoluer contre notre gré. L'utilisation des enfants dans les publicités est aussi dénoncée, en les plongeant directement dans une société de consommation dont ils sont victimes. Ici, les enfants sont représentés comme des panneaux publicitaires. La photo ci-dessus montre l'influence qui touche directement les nouveaux-nés en représentant un bébé dans une position foetale.

Adélie PAYET


WIM DELVOYE, DE L 'ART ET DU COCHON

Wim Delvoye, série"Cochon tatoué", 2010


Faire de la peau une œuvre d'art, voilà l'un des objectifs de l'artiste belge Wim Delvoye. Plasticien provocateur, il va élever des cochons dans une ferme afin de les transformer en œuvre d'art. Dès leurs 35 kilogrammes, ces cochons vont passer une fois par semaine chez le tatoueur. Anesthésiés pour ne pas être traumatisés, ils vont vivre et devenir petit à petit une toile vivante jusqu'à l'anniversaire de leur 200kg où ils vont être saignés par un saigneur belge afin de récupérer leur "peau-œuvre-d'art". Cette œuvre peut être présentée comme un trophée de chasse, comme une toile, comme une peau dans un musée ethnographique ou un cabinet de curiosité. L'artiste aime détourner les "savoir faire" populaires (ici, le tatouage) pour leur faire intégrer le champ de l'art contemporain, par des biais souvent ironiques. Ainsi l'artiste réalise son souhait de créer une œuvre qui s'enracine dans la société, une œuvre d'art qui a été vivante. Il poussera son idée jusqu'à faire tatouer un homme vivant qui s'expose de temps en temps dans des galeries.

Gaëtan GUILLAUMIN




VERS UNE NOUVELLE PEAU

Pour Orlan, l’art dans la peau est aussi une attitude, une couverture, une seconde peau.
Entre 1991 et 1993, Orlan subit 9 opérations de chirurgie esthétique, mises en scène et retransmises en public. Ces transformations physiques – dont la pose d'implants protubérants sur les tempes — relèvent d'une décision artistique : Orlan souhaite « se faire une nouvelle image pour faire de nouvelles images, retirer le masque de l'inné et redéfinir le principe même de l'identité ». Elle considère ses transformations physiques comme un nouveau souffle et de nouvelles possibilités de création avec son image. 

L’art lui colle à la peau.
© Orlan

© Orlan
Vincent LAGADOU

samedi 14 novembre 2015

Le Minimal Art

Minimal Art

Le minimalisme en art visuel, généralement appelé Art Minimal, a émergé à New York dans les années 1960, alors que plusieurs artistes commencaient à favoriser l'abstraction géométrique. Frank Stella, Dan Flavin, Carl Andre et Donald Judd font, entre autres, partie de cette émergence.
Le minimalisme s'appuie sur les recherches du Bauhaus, des constructivistes ou de Kazimir Malevitch, qui affirment que la peinture doit se libérer de toute représentation symbolique ou figurative et devenir non-subjective. Ad Reinhardt, précurseur du minimalisme, réalise des années 1960 et jusqu'à sa mort, des peintures monochromes en série qui font primer le vide, néant, le noir. Les artistes minimalistes s'inscrivent dans une opposition forte à l'Expressionnisme Abstrait, prônant une mise à distance de la subjectivité, de l'émotion, de l'affectif, du pathos, pour s'intéresser à l'essence des formes, des matériaux, des couleurs.
Les artistes minimalistes désirent limiter toute trace de facture picturale ou d'intervention de la main. Aussi, les œuvres minimalistes se composent généralement de formes basiques, de couleurs simples. Elles sont parfois réalisées suivant des processus industriels.
Le Minimalisme reprend à son compte l’expression de Mies van der Rohe, “Less is more”.

-Colombe Gourgeon et Quentin Fourage-

La peinture minimaliste

Frank STELLA

Frank Stella est un artiste américain dont la première exposition individuelle eu lieu en 1963. Il y présenta des peintures noires appelées Black Paintings. Ces toiles sont toutes constituées de la même manière : des lignes de peintures noires tracées en bandes régulières séparées par le blanc de la toile et qui forment un motif géométrique. Cette série marque une rupture avec l'Expressionnisme Abstrait et affirme le début  de la "peinture objet" qui va ensuite permettre la création du mouvement minimaliste. L’artiste travaille toujours sur de grands formats et par séries. 
Il invente ensuite les Shaped canvases (« toiles découpées ») à partir du début des années 60. Ces œuvres se caractérisent par l’originalité de la forme de leurs toiles qui correspond parfaitement aux motifs peints sur leur surface. Avec les Shaped Canvas, Frank Stella affirme la réalité matérielle du tableau. La toile n’est plus un simple support qui tente de se faire oublier, elle participe désormais pleinement à la peinture qu’elle porte en déterminant l’espace et la forme que doivent prendre les motifs. « What you see is what you see » - ce que vous voyez est ce que vous voyez -, déclarait Stella, il n’y a rien d’autre à découvrir qu’une surface qui se découpe sur un mur et indique, en négatif, l’espace autour de lui. Ainsi, avec Stella, le tableau devient un objet dont la fonction est de révéler l’espace environnant
À partir de 1975, son travail change complètement, l’artiste réalise des séries de compositions en reliefs, baroques, dans lesquelles il joue avec une multitude de formes découpées. Et depuis les années 1980,  Frank Stella réalise des sculptures monumentales en acier poli ou brûlé.

Frank Stella, Nunca pasa nada, 1964
Frank Stella
-Tamara Prud'hom-

Paul MOGENSEN

L’artiste américain Paul Mogensen, né en 1941, appartient au mouvement minimalisme. La construction de sa peinture est l’aboutissement d’une réflexion poussée, répondant  un protocole précis. Ses œuvres sont basées sur une grille recouverte d’une unique couche de peinture soigneusement appliquée, de la plus sombre tonalité à la plus légère. L’espace est ensuite occupé par divers formes, espacées ou non peintes, dans les tons du fond ou alors laissées telles servant de réserve de la couleur de fond. Ses peintures jouent sur les oppositions "forme/fond" “présence/absence”. Par son œuvre, Mogensen veut tester les limites de la capacité d’intégration d’images dans une autre image plus globale.
Mogensen éprouve un grand intérêt dans les différentes façons, pour une œuvre, d’acquérir un titre indépendamment de la volonté du peintre.
Paul Mogensen, Portfolio Part II. 1, 1981, Walker Art Center


 Paul Mogensen, Portfolio Part II. 7, 1981, Walker Art Center
-Morgane AMORIN-

Robert MANGOLD

Robert Mangold, né en 1937, est considéré comme un représentant de la peinture minimaliste. Après des études dans l’école des beaux arts de Cleveland, Mangold a révélé un intérêt particulier pour l’Expressionnisme Abstrait. Sa première exposition, en 1965, propose de grandes peintures sur Masonite et contreplaqué avec un style minimaliste affirmé. Il marqua ensuite les esprits en 1967, durant sa deuxième exposition solo, où il proposa des expériences sur des sections de cercles. Ses œuvres provoquent un élargissement de l’espace concret de la toile dans l’espace environnant. Mangold souhaite donner à ses œuvres une réalité et une vision plus complexe : il place la perception à la première place, sans effets démonstratifs, avec une retenue de moyens. Il élargit les possibilités d'un art positivement réducteur.
Robert Mangold Ring 2011
Robert MANGOLD, Four-Color Frame Painting 8, 1985

-Paul Houbron-


David NOVROS 

Né en 1941 à Los Angeles, David Novros pourrait être aujourd'hui qualifié de peintre systématique. C'est lors d'un voyage en Europe en 1963 qu'il découvrira les fresques de Padoue et les mosaïques de Ravenne qui l'inspireront par la suite dans son travail.
Les œuvres de Novros dialoguent avec les murs qui deviennent alors un élément à part entière de la composition, il cherche à créer une approche architecturale de la peinture. 
On peut observer une évolution forte dans le travail de l'artiste, restant cependant toujours dans la même thématique. En effet, au début de sa carrière, Novros travaillait sur des toiles découpées en formes géométriques et aux couleurs variées (shaped canvas) qu'il présentera en 1966 au Guggenheim museum. Année après année, le format des œuvres de l'artiste se voit augmenté jusqu'à recouvrir entièrement les murs et ainsi devenir des fresques. 
L’œuvre de David Novros explore ainsi l'occupation de l'espace qui l'entoure tout en le rythmant grâce à des formes géométriques simples dont les couleurs dialoguent ensemble.


Sans  titre,  David NOVROS

Sans  titre,  David NOVROS
-Chloé Cassabé-


La sculpture minimaliste / Specific Object

Donald JUDD

Donald Judd est un artiste plasticien et théoricien américain né en 1928 et mort à New-York en 1914. Ses recherches le mènent à produire des œuvres tridimensionnelles fondées sur des formes simples et font de lui un des principaux représentent du nominalisme.Composé d’acier inoxydable et de plexiglas rouge, ces 10 étagères équidistantes ont beau être parfaitement identiques, le spectateur ne les perçoit pas pareil dû à son point de vue et à la hauteur de ces “piles” qui ont tendance à déformer les étagères dues à la proportion variable de celle-ci.

Stack, 1972, Donald Jud
Donald Judd


-Baptiste Riom-

Carl ANDRE

Ancrées au sol, elles révèlent d'une certaine hauteur...Les installations de Carl André mettent à bas la verticalité des sculptures et les transforment en lieu.
En plaçant des échantillons de matériaux bruts au sol, l'artiste dévoile une autre façon d'appréhender l'aspect sculptural.
Il joue sur des phénomènes de séries et de répétitions, aux travers desquels le spectateur éprouve visuellement les différentes et les ressemblances entre les éléments, équivalents, qui composent chaque œuvre : leur position dans l'espace, le rapport de l'élément à un tout et le rapport entre les œuvres elles même.
Malgré leur épaisseur réduite, les œuvres font vivre le lieu, elles l'habitent et c'est le lieu qui les élève.
Base virtuelles de piliers invisibles, les carrés qui les composent sont des fondations imaginaires.
On ne parle plus seulement d'objet exposé. On peut facilement imaginer la continuité du travail ; une évolution infinie, tributaire de nos déplacements et des espaces modulés par la présence des visiteurs. L'artiste accepte tout ce qui peut altérer l'œuvre : son histoire, le temps, les traces des spectateurs qui peuvent marcher dessus…
Carl Andre propose donc une expérience réelle, physique, l’expérience de la perception de l’œuvre, de ses éléments, de son matériau, de son espace, et l’expérience de son propre déplacement


Exhibition view. Carl André, 1988 

Minimal Myth” at Boijmans Van Beuningen
-Elise Craipeau-


Robert MORRIS

Robert Morris, artiste plasticien et écrivain américain est l'un des principaux représentant du courant minimaliste et de l'art performance.
En 1965, il expose pour la première fois 4 cubes, entièrement recouvert de miroir. Ces cubes sont disposés sur la pelouse du Garden at Tate. Ils forment des obstacles pour le spectateur qui expérimente l'espace différemment.



Cube de miroir sur la pelouse du Garden at Tate 1965 / Wall Hanging (250 x 372 x 30 cm) 1969-70 / portrait de Robert Morris 
Robert Morris, Solo show at the Green Gallery, New York, 1964

En 1966, Morris laisse une nouvelle fois l'occasion d'expérimenter ses œuvres dans la Dawn Gallery à Los Angeles. Il créé un ensemble de 6 pièces de bois, fibre et verre de formes géométriques qu'il dispose aléatoirement dans la pièce. Le spectateur est invité à déambuler entre les pièces.
On remarquera que les formes utilisées par Morris dans les années 60 sont géométriques.Ce qui n'est plus le cas aujourd'hui. En effet, dans les années 70 il se tourne vers la forme molle, comme par exemple dans l'oeuvre Wall Hanging (1969-70).

Photo de l'oeuvre Wall Hanging (250 x 372 x 30 cm)
-Philippine de Font Reault-

Sol LEWITT, White Five-Part Modular Piece

Sol Lewitt commence sa carrière en participant à de nombreuses expositions majeures de l'Art Minimal et Conceptuel. En parallèle, il écrit « Paragraphs on Conceptual Art », dans lequel il énonce le postulat de toute la suite de son travail. Selon lui, l’œuvre n'est que l'illustration d'une idée, les détails n'ont que peu d'importance. 

Le Minimal Art a pour but de réduire la forme des œuvres à la simplicité. Sol Lewitt se caractérise par l'utilisation de formes simples, dépouillées, épurées ; comme le cube ; en exploitant toutes les combinaisons possibles à partir de cette forme. Il réalise différentes variations qui suivent une certaine logique. Son travail est illustré comme simple, fondé sur quelques éléments plastiques non complexes et combinés entre eux selon un schéma d'organisation prédéfini.

Progressive Structure, 1997.(123.8 cm x 133.4 cm x 62.9 cm) 
SolLewitt, White Five Part Modular Piece 
-Coline Royer-

Minimal Art - John McCRACKEN

John McCracken est un artiste plasticien américain né en 1934 et mort en avril 2011. Originaire de Californie, McCracken a été l’une des figures majeures du courant minimaliste qui est apparu aux Etats-Unis dans les années 60.
Ayant d’abord commencé une carrière picturale dont le style se rapprochait de l’Expressionnisme Abstrait, McCracken a ensuite opté, au début des années 60, pour des formes géométrique simple, plus particulièrement des colonnes monochromes constituées de planches de bois aux couleurs vives. Ces sculptures deviendront sa signature à partir de 1966, année où il se fera connaitre grâce à l’exposition Primary Structures à New-York.
Comme Matisse qui découpait dans la couleur pour jouer avec des juxtapositions à l'intérieur du tableau, John McCracken sculpte dans la couleur pour la confronter en tant que volume avec d'autres surfaces ou volumes colorés. Reprenant dans ses sculptures le principe de Mies Van der Rohe selon lequel « less is more » (moins est plus), McCracken a su dépasser l’idéal de pure objectivité voulu par les règles minimalistes, en associant à ses œuvres des couleurs intenses, des noirs laqués profonds ou encore des gris métallisés dans lesquels le spectateur peut voir son reflet.
Quasiment tout au long de sa vie, John McCracken créa des cubes, planches, pyramides ou vaisseaux spatiaux, dont les surfaces brillantes de fibre de verre ou d'acier renvoi à l'esthétique automobile ainsi qu'aux récits de science-fiction.
McCracken considérait ses œuvres "comme des objets qui ne se réfèrent à rien d'autre qu'eux-mêmes, et en même temps à tout". Ses sculptures se trouvent aujourd’hui dans les plus prestigieuses collections américaines.





-Thomas Rudi-

Colonnes de couleur, Anne TRUITT 

Artiste Américaine, Anne Truitt est une fervente actrice du mouvement minimaliste qui débuta sa carrière minimale art au début des année 1960. C'est dans la création de ses grandes colonnes bigarrées qu'elle atteint  sa véritable "maturité artistique". Un production de scultuptures tout en longueur et peintes de manière à ce que différentes nuances de couleur s'observent. Le choix de cette forme rectangulaire, très élevée et fortement imposante, s'explique pour elle en une phrase concise; « L'idée m'est alors venue à l'esprit qu'une sculpture se tient juste debout, et que le temps passe son chemin autour d'elle.» Par ailleurs, elle se justifie sur l'utilisation de couleurs comme le seul produit avec lequel elle souhaitait travailler. Quant aux choix des nuances elle s'inspire directement de l'environnement qui l'entoure. Ainsi, les sculptures Summer Dryad (1971), Autumn Dryad (1975), Winter Dryad (1973) et Spring Dryad (1975), sont directement influencées par le climat de Washington. Par exemple, L'été est d'un vert criard, dû à une végétation luxuriante en été. L'automne est dépeint par un orange bûlant, reflétant le feuillage des arbres à cet époque de l'année. L'hiver est noir, peut-être dû à l'aversion que l'artiste a pour cette saison. Le printemps, d'un rose allant légèrement sur le blanc. Son œuvre est très rectiligne et en même temps très colorée, avec une certaine distance, proposant une abstration aux sentiments.
Anne Truitt in her Twining Court studio, Washington, DC, 1963.
The Hirshhorn Museum, exhibition of Anne Truitt's work since 1974.
-Meggie le Dain-

Judy CHICAGO

L’artiste américaine Judy Chicago, de son vrai nom Judy Cohen, est née le 20 Juillet 1939 à Chicago. Ses premières œuvres s'inscrivent dans la mouvance minimaliste.
Rainbow Pickett - Judy Chicago, 1964
Série de 6 trapèzes de différentes longueurs et de différentes couleurs posées contre le mur les uns parallèles aux autres. Les couleurs ( menthe, bleue, pourpre, rouge, orange et jaune) donnent l’impression d'un arc-en-ciel.
Le minimalisme, une tendance qu'elle abandonnera en faveur d'un art qu'elle voudra davantage en adéquation avec ses convictions : The Dinner Party et The Holocaust Project.


L'oeuvre est importante car c'est la première oeuvre conçue par une femme, pour glorifier des femmes. Ensuite, la représentation du sexe féminin constitue un sans précédent dans le monde de l’art. Enfin, elle rétablit les “travaux féminins” (broderie, peinture sur porcelaine, etc.) en les incluant dans l’œuvre.
Judy Chicago

-Lise Lescoublet-

Larry BELL

Depuis la fin des années 1950, l'artiste américain réfléchit sur les questions de perception et d'illusion d'optique. Membre actif du mouvement "Finish Fetish" aux côtés de John McCracken et Graig Kauffman, les 3 rebelles décident de prendre un autre chemin tout aussi minimaliste.
Au départ, les œuvres de Larry BELL sont plutôt discrètes, avec l'utilisation du cube et du carré. L'illusion d'optique se fait déjà ressentir dans "Conrad Hawk" en 1961. Quelques années plus tard en 1969, l'artiste ose affirmer ses préférences en utilisant son matériau fétiche, le verre. Il crée alors ses fameux "cubes" de verre posés sur des socles transparents, il va ensuite les décliner de plusieurs façons (opaque, semi-transparent, fumé, ... ). Son travail du verre est complexe, il s'est ainsi exprimé à ce sujet : "Je travaille le verre comme un ingénieur ...". En effet, dans son premier socle de verre l'artiste a utilisé des technologies de revêtements développées dans l'industrie aérospatiale. Il a ensuite exploité la "métalisation en couche mince", le métal qui est un matériau opaque est alors révélée sous un aspect semi-transparente.
Derrière ses œuvres minimalistes, Larry BELL cache en réalité une grande réflexion ainsi que des procédés technologiques recherchés.

Cube de verre utilisant la métalisation en couche mince 
Larry Bell
-Justine Cougnaud-

Richard SERRA

Richard Serra est un artiste Américain prééminent de la période post-expressionniste. Son travail de sculpteur attire l'attention sur une nouvelle manière de vivre et d'expérimenter les sculptures. Connu pour ses immenses œuvres d’acier, celles-ci obligent les spectateurs à s’engager au cœur d’elles-mêmes.
Tout comme un certain nombre de minimalistes, Richard Serra propose, à l’inverse d’un art métaphorique et symbolique, une idée de la sculpture en tant qu’expérience phénoménologique où la gravité, l'espace, le processus et le temps ont une place importante. Pourtant, ses sculptures évoquent le sublime par leur démesure et leur matérialité.

"7", 80 feet, Museum of Islamic Art Park Doha, Qatar
"tilted spheres", Pearson International Airport, Terminal 1, Mississauga, Canada, 2007.

-Céverine Girard-

Ronald Bladen

Ronald Bladen est un artiste peintre et sculpteur américain. Son œuvre The X se situe entre l’Expressionnisme Abstrait et le minimalisme. La sculpture est très imposante, il s’agit de la représentation d’un X à une échelle démesurée, d’autant plus accentuée du fait qu’elle soit placée dans un intérieur. Ronald Bladen a réalisé The X en aluminium puis il l’a peint en noir. A l’origine, The X était placé à l’intérieur, puis il a été déplacé en extérieur.
The X, Ronald Bladen, aluminum peint,  Corcoran Gallery, Washington, DC, 1967
Ronald Bladen; Black Tower (1986) 
-Agathe Desbrière-

Eva HESSE

Eva HESSE est une artiste des années 1960. Bien qu’ayant une carrière courte car décédée très jeune (34 ans), elle fait partie des artistes emblématiques du Minimal Art. 
Ses premières œuvres touchent au dessin, la peinture, l’aquarelle, la gouache et la sculpture. Mais très vite elle évolue et s’inscrit dans une approche plus énigmatique et abstraite.
Son travail, avec celui d’un autre petit groupe d’artiste (Acconci, Morris, Nauman, Tuttle, Friedman, Shapiro), est vite qualifié de post-minimaliste. En effet, Eva HESSE ne se contente pas simplement de créer des œuvres dépouillées, neutres et réduites au possible. Elle se détache avec un gout pour les aspérités biomorphiques et laisse place à l’excentricité.  Cela se concrétise avec des allusions érotiques. 
Dans son atelier, Eva HESSE créait selon le principe de « test piece ». Ses productions n’avaient aucune finalité. Pas de ratés ni de réussite. Ce fonctionnement lui permettait d’explorer la matière sous toutes ses coutures et jusqu’à son paroxysme.
Elle se concentrait principalement sur les matières molles, comme le feutre, le caoutchouc, le latex, mais surtout la ficelle, la corde et différents lambeaux. Ce sont des matériaux non durables et, initialement utilisés pour le moule de la sculpture et non la sculpture. Elle invite le spectateur à toucher ses sculptures. Il n’y a plus d’ordre. C’est pourquoi ses œuvres s'approchent de "l’Antiform".
Eva HESSE utilisait le minimalisme en tant que point de référence esthétique ou conceptuel. Mais elle garde une singularité dans ce mouvement. Elle bouleverse les codes de la sculpture et pose des bases devenues courantes dans l’art contemporain actuel.
Eva Hesse devant sa sculpture Untitled or Not Yet dans son Atelier à la Bowery, New York 1969 
Sculptures baton : Sans titre, (Untitled (Seven Poles)), 1970
Fibre de verre, résine, polyester, polyéthylène, fils d'aluminium
272 x 240 cm
-Martin Jules-

Juste la lumière

Dan FLAVIN

Dan Flavin, artiste minimaliste américain, né en 1933, utilise la lumière comme couleur et comme matériau. Pour cela il se sert de tubes de néon ordinaires dans ses installations telles que The Diagonal of May 25, de 1963 ou encore Three sets of tangented arcs in daylight and cool white, de 1969. Il a ainsi développé une nouvelle forme radicale d'art qui a libéré « l'image » de son cadre, et l'a transformé en objet coloré lumineux, consumant l'espace dans lequel il se trouve. La peinture de mur est alors remplacée par une installation légère qui est en lien avec la libération douce et apaisante de la lumière dans la pièce. Le spectateur se trouve immergé dans un splendide jeu de lumières et de couleurs qui permet une expérience physique de l'art. L'emplacement des néons de différentes couleurs dans l'espace crée des lignes de force, et une unité lumineuse qui fait varier la perception première de l'espace. Des déformations sont alors créées grâce aux reflets des néons, la pièce s'allonge ou s'étire. L'artiste joue avec les couleurs, les lumières, les ombres, les formes et l'espace de la pièce, pour créer une distortion, et offrir au spectateur un tout autre regard sur l'environnement d'origine désormais transformé et illuminé. Il remet aussi en question la place d'une œuvre d'art dans un musée en jouant sur l'emplacement de ses installations. L'œuvre n'est plus vue de l'exterieur, mais de l'interieur, car elle est vécue par le spectateur qui est lui-même plongé au cœur de l'environnement lumineux.
Dan Flavin, Three sets of tangented arcs in daylight and cool white, 1969, National Gallery of Canada
Dan Flavin (1933-1996)  
-Margot Albert Heuzey-