samedi 24 octobre 2015

Le dessin dans l'espace


Le dessin a toujours été  un outil de langage.  A la préhistoire déjà, les hommes occupaient l’espace de leurs grottes avec des dessins, des représentations d'animaux, des mains, des signes, …. Néanmoins, le dessin - écriture comprise - s'est aussi développé sur de plus petits supports comme des peaux, des écorces, ou des toiles : on pouvait les transporter, les donner, …. 
Dans ce dossier, on va s'intéresser aux dessins qui s'inscrivent dans un espace important. L’espace qui nous entoure représente un formidable support d’expression pour les artistes. Cette forme de dessin que l’on pourrait qualifier de spatiale, de monumentale, d'immersive prend de multiples apparences. Il joue avec l'espace, l'architecture, la perception, peut être abstrait, figuratif, narratif, conceptuel… Que ce soit sur des surfaces lisses et faciles à travailler (murs de béton, etc.) ou encore du sable ou des roches, rien n’arrête les artistes.
Appréhender un dessin qui s'inscrit dans un espace (parfois important), demande au spectateur de bouger, de se déplacer, de chercher le meilleur point de vue. Et le point de vue a une importance primordiale dans ce genre d’œuvres… Nous vous proposons le notre.
Chloé Cassabé / Céverine Girard


I  -  L E   D E S S I N   D A N S   L 'ESPACE   N A T U R EL :


L E S   G E O G L Y P H E S   D E   N A Z C A // par Meggie Le Dain

Découverts au début du XXème siècle, ils fascinent autant qu’ils intriguent. Perdus au milieu de déserts arides au Pérou, les géoglyphes de Nazca ne cessent de susciter l’intérêt quant à leur datation et leurs significations. Selon des études, ils furent réalisés par une civilisation aujourd’hui disparue, les Nazca ou autrement dit les pré-incas. Ces dessins sont d’une taille colossale et s’étalent parfois sur plus de 450km². Ils ne sont lisibles que du ciel. Gravés dans la roche, ils dessinent des formes figuratives souvent d’animaux tels que le singe ou le colibri ; ils peuvent également ne représenter que des signes totalement abstraits, mêlant lignes, courbes et angles. De nombreux scientifiques se sont penchés sur l’interprétation de ces géoglyphes depuis leur découverte Plusieurs théories sont ainsi avancées mais aucune n'est réellement retenue par manque de preuves.

Paul KASOK, fut le premier à les découvrir et les considère comme un immense livre d’astrologie. En effet, il reconnait un certain parallélisme entre les lignes et les rayons du soleil lors de solstices ou d’équinoxe. Cependant, le Dr. Gérard Hawkins démonte cette spéculation en révélant que moins de 20% de ces lignes ont un véritable lien avec l’astronomie. Anthony Aventi le soutient entièrement et entre de plus en plus en désaccord avec la thèse de la mathématicienne allemande Maria Reich qui pensait qu’ils étaient destinés aux dieux pour les récoltes et la pèche. Un bon nombre d’autres hypothèses s’attarde sur ces représentations. Les géoglyphes pourraient être la trace du passage des "petits hommes verts" ou encore des repaires pour un système d’irrigation souterrain ; tant de suppositions qui restent sans réponse. Trouverons-nous seulement un jour le message que les Nazca ont laissé ?


S P I R A L   J E T T Y - R o b e r t   S m i t h s o n // par Philippine de Font-reaux

En 1970, l’artiste américain Robert Smithson, théoricien du Land Art crée Spiral Jetty, une œuvre monumentale de 457 m de long sur 4,6 m de large sur le Great Salt Lake aux États-Unis. Ce lac bien connu pour son eau rouge due à la présence d’une algue spécifique a attiré l’artiste qui en a fait son terrain de jeu. 

L’œuvre se présente sous la forme d’une spirale s’enroulant dans le sens inverse des aiguilles d’une montre qui, lorsque le niveau du lac augmente, est totalement submergée. Durant six jours, 625 personnes ont déplacé 6 783 tonnes de rochers basalte noire, terre, bois, et cristaux de sel pour créer la spirale de Smithson. Originellement, cette dernière était noir (rochers) et rouge (eau du lac), mais au cours des années et des intempéries, l’œuvre s’est dégradée (ce qui est le propre du Land Art) laissant apparaitre une ligne de rochers blancs (recouverts d'une croute de sel) dans une eau rosé.



L'OEIL DU CYCLONE  - Denis Oppenheim : dessiner dans le ciel //CC
Denis Oppenheim - Tourbillon - L'œil du cyclone - 1973
En 1973, Denis Oppenheim affrète deux avions. Un avion pour tracer dans le ciel le dessin d’un vortex de 1,2 sur 6,5 km au-dessus du lac asséché en faisant lâcher un jet de fumée dans la vrille de l'appareil. De l'autre avion, il filme et photographie l'action. Le jet de fumé trace un tourbillon, sorte de vortex, ou de gribouillage primordial. Le tracé vaporeux et éphémère s'évanouira rapidement dans le bleu du ciel. La pellicule en garde la trace, fragile, immense, magnifique…
A plusieurs reprises Oppenheim a dessiné dans l'espace du paysage des signes, codes énonçant l'idée d'un danger. Le tourbillon de fumée, reprend le dessin simplifié d'un cyclone dévastateur.


II - L E   D E S S I N   D A N S  L'ESPACE   DE   L A   R U E :

M U T O - B l u // par Lise Lescoublet

Blu est un artiste d’origine Argentine, né à Bologne en Italie, en Mai 1980. Blu est le pseudo d’un artiste peintre et vidéaste. C’est au début des années 2000 que commence sa renommée en Italie. Il expose son art un peu partout dans Bologne et dans la banlieue. Blu s’initie au Street art en bombant ses Graffitis dans les rues, et en tournant de courtes vidéos.

En 2001, il développe une nouvelle technique : les rouleaux télescopiques, ce qui lui permet de faire évoluer son identité visuelle en créant des œuvres gigantesques. 
Ses créations sont étranges et contiennent des personnages monstrueux qui interpellent les passants.
C’est sa vidéo “Muto”, qui se traduit par Muet, qui a rendu Blu célèbre. Une animation composée d’une succession rapide d’images de ses peintures juxtaposées. Elle a été tournée en 2008, à Buenos Aires et à Baden. Cette vidéo a été vue par plus de 10 millions de téléspectateurs et a également reçu une récompense pour le Grand Prix du Festival de Clermont-Ferrand en 2009. Les murs deviennent les supports de graffs en mouvement. L’appareil photo capte l'un après l'autre les milliers de dessins réalisés dans l’espace et le temps, petit à petit recouverts les uns par d’autres.
La vidéo est accompagnée de sons électroniques et de bruitages rendant ces images plus vivantes.




A a k a s h N i h a l a n i // par Baptiste Riom

Aakach NIHALANI est un artiste américain qui réalise des installations à partir de scotch dans les rues de New-York. Pouvant être qualifié de Street Art, son concept est de jouer avec les formes géométriques simples, comme des rectangles, des carrés. D’après l’artiste, son travail sert à “mettre en avant les contours et l’élégante géométrie de la ville". Ses œuvres jouent beaucoup avec la perspective, créant des trompe-l’œil et invitant le spectateur à se mettre en scène. La simplicité de ses réalisations en fait son efficacité. De plus, le lieu sur lequel il travaille n’est pas le fruit du hasard. Il essaye de s’adapter à des parcelles de murs ou des surfaces particulières et joue ainsi avec, pour créer l’illusion.



III - L E   D E S S I N,   DU   SOL   AU  PLAFOND  :

L A   G R O T T E    C H A U V E T // par Thomas Rudi

L’art existe depuis longtemps, on le sait. Mais saviez-vous que les premiers artistes s’appellent « Hommes de Cro-Magnon » ?
Si vous en doutez encore, la grotte Chauvet devrait-vous en persuader. Située dans la commune de Vallon-Pont-d'Arc (Ardèche), cette grotte est constituée d'un vaste réseau souterrain de près de 500 m de long composé de plusieurs salles qui accueillent plus de 1000 peintures rupestres dont 425 représentations d’animaux. Elle est à ce jour la plus ancienne grotte ornée de l’humanité avec ces dessins datant d’il y a 36.000 ans. Appelée grotte « Chauvet » en hommage au spéléologue qui la découverte en 1994, celle-ci fut immédiatement fermée au public afin d’éviter toute dégradation de ses parois comme ce fut le cas aux grottes de Lascaux.
Les deux tiers des animaux représentés dans la grotte de Chauvet sont des espèces potentiellement dangereuses que l’homme préhistorique ne chassait pas.
Ces figures animales, d'une grande beauté stylistique, montrent que l'art pariétal atteint dès ses débuts un très haut niveau de raffinement artistique. Celles-ci sont dessinées au charbon de bois, en tirant parti des anfractuosités et des variations de teintes des parois en argiles et calcites. La diversité et la maîtrise des techniques, telles que la gravure, la préparation des parois par raclage, le dessin au fusain souvent suivi d'une estompe en écrasant la couleur avec les doigts pour obtenir des nuances diverses, le détourage des contours et l’utilisation de techniques mixtes, onT complètement remis en cause l'idée que l’art préhistorique évoluait très lentement de manière linéaire et ascendante. A toutes ces techniques, on peut noter qu’à certains endroits les artistes ont même laissé leur signature qui s’apparente à une empreinte de leur main à l'ocre rouge.


La grotte Chauvet est depuis 2014 inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO, et une réplique de celle-ci a ouvert ses portes en avril 2015 à quelque pas du site.


L A B Y R I N T H E   D E  L A  C A T  H E D R A L E  D E  C H A R T E S
// par Margot Albert--Heuzey

Réalisé vers 1200-1205, sur le pavement de la nef, avec ses 12,89m de diamètre, ses 0,34m de largeur de chemin et ses 261,50 m approximatif de déroulé, Le Labyrinthe de la Cathédrale de Chartes propose aux visiteurs une entrée plutôt inattendue dans ce lieu paisible et respectable. En réalité, plusieurs lectures sont possibles. Une référence au mythe de Thésée et du Minotaure, une visualisation du parcours de l'âme errante selon le pêché de façon tortueuse, une invitation à être pèlerin, ou encore le seul parcours vers la rédemption christique ?
En effet, ces hypothèses sont toutes possibles, en sachant que le parcours est un chemin unique, où il est impossible de se perdre, et ce malgré les quatre « tournants » et trente « épingles à cheveux ». Cependant, sa forme complexe et ses chemins s'enroulant les uns autour des autres ne créeraient ils pas une confusion ? Ne serait-ce pas une passage dédié à la purification ? Un passage où les âmes charitables réussiraient à trouver leur chemin et à se purifier et se laver de leurs péchés, et où à l'inverse, les âmes hantées et torturées par le diable ne retrouveraient pas leur chemin et finiraient par se perdre définitivement dans ce labyrinthe sans issues.
A la limite de l'illusion d'optique,
où l'on confond les lignes entre celles du haut et celles du bas, ce labyrinthe offre un regard sur la manière de placer une ligne dans un espace tout en lui donnant un certain sens, qu'il soit christique ou autre laissant toujours une place à l'imaginaire et au regard esthétique


W A L L   D R A W I N G  # 7 9 7 - S o l  L e w i t t // par Colombe Gourgeon


Instruction : «  le premier « dessinateur » dessine une ligne irrégulière horizontale en haut d’un mur avec un marker noir. Ensuite le deuxième «dessinateur » essaie de copier la première ligne sans la toucher et avec un maker rouge. Le troisième fait pareil avec un marker jaune. Le quatrième avec un bleu. Puis le deuxième « dessinateur » suivi du troisième et du quatrième copient la dernière ligne dessinée jusqu’en bas du mur. »
Ainsi doit se construire l’œuvre de Lewitt,  artiste américain minimaliste et conceptuel qui propose, en dessinant sur les murs, une œuvre réellement bi-dimensionnelle et qui ainsi confirme sa vision de l’art conceptuel : pour lui le dessin présent sur le mur est secondaire à la compréhension projet artistique : c’est le concept qui prime. Il ira jusqu'au bout de son concept, puisqu'il  sépare conception et réalisation : ce sont des assistants qui exécuteront ses œuvres grâce aux certificats d’authenticité et d’un diagramme (conçus par l'artiste) .
Sol Lewitt est aussi sculpteur et notamment reconnu pour ses célèbres « Structures » faites de formes géométriques de bases formant un réseau.
« Une fois que l'idée de l'œuvre est définie dans l'esprit de l'artiste et la forme finale décidée, les choses doivent suivre leur cours. Il peut y avoir des conséquences que l'artiste ne peut imaginer. »


H e i k e   W e b e r // par Elise Craipeau



Allemande, Heike Weber est une étonnante artiste qui utilise le trait d'un marqueur permanent afin d'habiller des surfaces comme les murs ou le sol d'un espace préalablement recouverts d'acrylique. Ces dernières peuvent atteindre jusqu'à 600 mètres carré.
Joueuses, originales, statiques dans la dimension 2D de chaque aplat de surface, les réalisations s'animent, prennent vie dans les circonvolutions des motifs dessinés qui semblent évoluer dans l'espace. Les œuvres d’Heike Weber n’aiment pas les définitions étroites ni les identités closes. Elles dépassent les frontières, n'ont plus de limites. Elles envahissent le monde. Légères et malléables, elles semblent glisser sans cesse hors d’elles-mêmes à mesure qu’elles se mettent à interagir avec le monde qui les entoure.
Elles sont d'une part soumises aux fantaisies de l’architecture d’un lieu, d'une autre aux danses légères d’une lumière sur un carreau, ou encore aux ombres lentes d’un nuage. Elles dansent et fluctuent au même rythme que le monde et ne demandent de la part du spectateur qu'une seule et unique chose : qu’il arrive à voir et aimer en elles ce qui lui échappe.
Les lignes sinueuses nous transportent et nous amène à rêver. Heike Weiber joue des interactions subtiles entre l'environnement et le spectateur, le dessin et l'espace.


Y o s u k e   G o d a // par Morgane Amorin

L’artiste japonaise, Yosuke Goda donne vie aux murs à l’aide de simples marqueurs. Elle crée un environnement immersif, aux détails riches et sublimes, s’étalant du sol au plafond. Ses dessins sont composés d’éléments organiques, de personnages difformes, d’animaux, de créatures... L’artiste n’a aucune pitié pour le blanc des murs, sols et plafond, elle engloutit l’espace nous empêchant presque de respirer dans ces pièces recouvertes de dessins. Ses œuvres sont tels des monstres semblant croître sans aucun contrôle. Elles révèlent la passion de l’artiste pour les paysages fantastiques ainsi que son grand sens du détail.


F A T U M - J e r o m e   Z o n d e r // par Justine Cougnaud

L’artiste français, Jérôme Zonder, explore un univers plutôt particulier. Dans chacune de ses illustrations, dans les noirs et gris de ses crayons, se développe une ambiance souvent lourde et des scènes violentes qui ne laissent pas le spectateur indifférent. L’artiste nous transporte dans des histoires aux allures de scènes d’horreurs avec pour personnages principaux … des enfants. Son style, sombre, nous laisse percevoir une dimension cachée telle l’innocence qui mute en déraison. Ce « virtuose du dessin » comme on le surnomme, nous met face à une série d’illustrations tout droit sortie de son imaginaire, laissant cours à ses pensées les plus profondes. 
Durant l’exposition « FATUM » à Paris en 2015, l’artiste a accroché un ensemble de dessins encadrés espacés les uns des autres sur un mur recouvert d’arbres dessinés au fusain comme pour nous raconter une histoire. Jérôme Zonder nous immerge dans une forêt sombre, en référence aux contes de notre enfance, notamment le « Petit chaperon rouge ». 
L’artiste nous transporte dans un univers parallèle à la fois surprenant et effrayant.


J A R D I N   D ' H I V E R - J e a n   D u b u f f e t // par Coline Royer

Jean Dubuffet est un sculpteur, auteur mais aussi peintre français. Il est l'inventeur du terme « art brut » qui regroupe les productions artistiques faites par des personnes qui ne connaissent rien à l'art. Cela permet de désigner un art spontané, sans prétentions culturelles, sans démarche intellectuelle. Jean Dubuffet est également l'auteur de nombreuses critiques de la culture dominante, par exemple avec son ouvrage nommé «Asphyxiante culture». Cet artiste a connu de nombreuses périodes explorant différents styles. Il est passé par le dessin, la peinture, la sculpture pour afin aboutir à de véritables projets architecturaux. Ces derniers naissent généralement d'une maquette en polystyrène. 
Une de ses œuvres nommée Le jardin d'Hiver, au Centre Pompidou, est en polyuréthane sur Epoxie. Cette œuvre est tridimensionnelle : 480*960*550cm. Contrairement à son titre, il n'est pas question de nature mais plutôt d'une grotte ou d'une caverne. Afin de pénétrer dans cet espace, il faut ouvrir une porte permettant de découvrir l'intérieur de cet endroit clos. Ce dernier est constitué de lignes noires sur fond blanc que l'on retrouve sur les murs, le sol et le plafond. Notons que le sol et les parois sont bosselés et cabossés. Les dénivellations ou accidents sont tantôt soulignés, tantôt contredits par les tracés noirs. La perception du visiteur s'en trouve bousculée rendant l'expérience de la promenade instable, étrange, chaotique.

                                                                                                                                   
IV -Q U A N D    L E   D E S S I N   J O U E   A V E C    L ' A R C H I T E C T U R E :

A N A M O R P H O S E S - V a r i n i // par Tamara Prud'hom


Felice Varini est un artiste contemporain suisse de renommée internationale qui s’est spécialisé dans l’anamorphose. Toutes ses œuvres jouent avec l’espace et le regard du spectateur en créant des illusions d’optiques. En effet, pour pouvoir apprécier ses propositions, il faut se placer à un point précis afin d’obtenir le bon angle de vue. En se déplaçant dans l’espace, le point de vue change et l'œuvre semble prendre vie, elle se transforme totalement en changeant de forme. 
Varini, Terrasse du Grand Palais - Paris - 2013
Pour réaliser ses anamorphoses, Varini utilise une image qu’il projette directement sur l’architecture et peint ou fait peindre les formes sur le bâtiment. il compose, à partir de formes géométriques simples, ses dessins dans l'espace. Formes, mouvements, couleurs et rythmes colorées surprennent le regard des spectateurs et proposent une vision, à la fois contemplative et dynamique de la terrasse du Grand Palais, à Paris, en 2013. 

                                
A n t i   V J // par Martin Jules

Anti VJ est un label dans le domaine du live audiovisuel. Ce collectif regroupe plusieurs artistes qui réalisent des installations immersives. L’équipe est composée d’un graphiste, un vidéaste, un musicien et un créateur-coding (conception de logiciels de création visuelle et sonore). La caractéristique commune des projets soutenus est l’utilisation de la lumière projetée. Les projets sont principalement des dispositifs scéniques, ou bien mapping sur mur blanc ou bâtiment.
Le rendu se veut novateur jouant avec nos perceptions. L’utilisation adéquate de la musique électronique avec la vidéo est un point clé. D’où le sigle VJ qui signifie video-jockey. Le vidéo-jockey met en performance le travail d’un DJ. Le fort parti-pris de chaque vidéo fait l’unicité de ce label. Les arts classiques ont des soucis à se faire. La beauté concerne aussi le numérique.
Anti VJ - St Gervais



V - L E   D E S S I N   E N   3 D :


F r i t z   P a n z e r // par Quentin Fourage

Tout se réduit à l'apparition d'un contour précis : une série de fils de fer noirs tendus dans l'espace, comme des incisions. Le contour enserre la forme et marque à lui seul la présence de l'objet. La surface est délimitée sans être matérialisée. Un dynamisme émerge à partir d'un seul matériau. On pense à une idée de croquis, de dessin non fini ou non abouti. Une œuvre en 3D qui se veut en 2D, un mouvement dans un moment figé.


D a n i e l   B u r e n // par Paul Houbron

Né en 1938, Daniel Buren experimentera la peinture, la sculpture et le cinéma dans ses études à l'école des métiers d'Art et aux beaux arts de Paris. Buren va découvrir au cour de l'année 1965 le motif qui constituera la figure emblématique de ses œuvres: une toile de store de fond blanc aux bandes colorées separées de 8,7 cm.
Au fur et à mesure de sa carrière, il délaissera son support pour devenir un plasticien talentueux. Malgré un Lion d'or à la Biennale de Venise, l'installation multiforme placée dans la cour d'honneur du palais Royal à Paris fut un scandale en 1986, mais restera son œuvre la plus célèbre. En 2007, la ville de Nantes a acceuilli Buren et ses anneaux qui deviendront un emblème de la cité des ducs.
Daniel Buren est connu pour être un artiste obstiné qui suscite l'attention, divise, surprend et émerveille à la fois.
Daniel Buren - Colonnes - Cour d'honneur du Palais Royal

vendredi 16 octobre 2015

La face cachée du monochrome

Monochrome : une seule couleur. De son étymologie grecque mono signifiant seul et chroma la couleur, le monochrome désigne une œuvre composée d’une unique couleur, nuance ou valeur. Son apparition dans les années 1910 remet en cause les manières traditionnelles d’envisager la création et renouvelle les pratiques artistiques. Autrefois qualifiant un camaïeu ou une grisaille dans l’histoire de l’art, il devient au 20e siècle, un substantif, puis un genre à part entière.
A travers les propos et les œuvres de certains artistes, nous allons découvrir pourquoi ils réduisent la peinture à une unique couleur, vide de représentation, pleine de sens, de vibration, de sensibilité, de poésie, de revendications, de…
Morgane AMORIN 
Lise LESCOUBLET 

Alphonse Allais : le précurseur moqueur

Combat de Nègres dans une Cave, Pendant la Nuit. Reproduction du tableau de Paul Bilhaud
Née en France en 1854 (le 20 octobre), le célèbre journaliste, écrivain et humoriste, Alphonse Allais nous transporte dans un univers fait d'humour absurde. Tout d'abord connu pour son écriture, grâce notamment à ses livres « A se tordre » (1891) ou « Vive la vie » (1892). Il séduit par sa poésie teintée d'un humour fin constitué souvent de vers homophones comme on peut le voir : « Alphonse Allais de l'âme erre et se f… à l'eau. Ah ! L'fond salé de la mer ! Hé ! Ce fou ! Hallo. ». 
Alphonse Allais, Première Communion de Jeunes Filles Chlorotiques par un Temps de Neige - 1882

Mais en 1882, l’écrivain se tourne vers une autre pratique que l’écriture, la peinture ! Son inspiration lui est venue de l’artiste Paul Bilhaud, alors qu’il découvrait son monochrome noir intitulé « Combat de nègres dans une cave pendant la nuit ». Ce gag l’a beaucoup amusé et il a ensuite décidé de s’inspirer de ce principe-là. Son premier monochrome sera blanc et s’intitulera « Première communion de jeunes filles chlorotiques par un temps de neige ». Au fil des années, il en peindra plusieurs de cette série (bleu, rouge, vert, gris et jaune) toujours accompagné d'une petite phrase humoristique. Grâce à l’écriture, Alphonse Allais, arrive à animer ses monochromes et donne une direction humoristique à notre imagination.
Justine COUGNAUD 

Kasimir Malevitch : le père du monochrome

Kasimir Malevitch, Carré blanc sur fond blanc 
Kasimir Malevitch, personnage emblématique de la peinture abstraite et créateur du « suprématisme », est un peintre, dessinateur, sculpteur et théoricien russe né à Kiev en 1878.
En 1918, Malevitch réalise « Carré blanc sur fond blanc », œuvre considéré comme la première œuvre monochrome de la peinture contemporaine et créant dans le même temps le « suprématisme ». Après la guerre et le changement de régime en Russie, les artistes russes révolutionnent l'histoire de l'art sur inventant de nouvelles bases en s’affranchissant de toutes contraintes. Mesurant 78,7 sur 78,7 cm, cette huile sur toile est aujourd’hui conservée au Musée d'Art moderne (MOMA) à New York. Composée comme son nom l'indique d’un carré blanc (pas tout à fait carrée) sur un fond blanc, cette peinture témoigne, comme pour le « Carré noir » (tableau faisant partie de la première série d’œuvres abstraites exposées par Malevitch), d’une grande sensibilité.
La trace de la main de l’artiste est visible dans la texture de la peinture et ses subtiles variations de blanc, légèrement bleuté pour la forme centrale, plus chaud et ocré sur la périphérie, crée une matière dense et complémentaire au point qu’on ne peut séparer la forme du fond. Malevitch a utilisé deux blancs d’origines différentes : une marque française pour le carré, et russe pour le fond, ce qui lui a permis d’obtenir ces « textures » différentes. La position décentrée du carré, pesant sur la droite, et le léger cerne noir autour, dynamisent l’ensemble, contribuant à la sensation d’espace.
Kasimir Malevitch, Carré noir
En parallèle, Malevitch développe les « architectones », modèles en trois dimensions qu’il réalise à partir du début des années 1920. Ces formes géométriques en trois dimensions sont des recherches théoriques dont le but est de faire évoluer le suprématisme de la peinture, jugée dépassée, à l’architecture. Les « architectones » sont destiné à cette époque à être utilisée comme des objets d’étude pour les jeunes générations d’architectes.

Kasimir Malevitch, Architectones
Malevitch est mort en 1935, mais il fallut attendre les années 1970 pour que son œuvre soit enfin reconnu.

Thomas RUDI


Rodtchenko: Rouge, Jaune, Bleu - l'essentiel de la peinture

Triptych- Pure Colors- Red, Yellow, Blue, 1921
Aleksandr Mikhaïlovitch Rodtchenko, dit Rodtchenko est un peintre, dessinateur, photographe russe. Il appartient au mouvement de l’avant garde russe. Malevitch pour décrire son travail parlera de constructivisme, ce qui donnera le nom au mouvement.Ici Rodtchenko ne géométrise pas sa toile, comme à son habitude, il la divise, la décompose pour donner trois surfaces planes et monochromes : Il déconstruit la peinture, la ramène à l'essentiel. Il ne fait figurer aucune iconographie identifiable et utilise la base de la création picturale, les trois couleurs primaires..Il faut comprendre son geste comme la libération de la peinture de toute finalité et contenu. Nous pourrions faire un parallèle actuel avec trois écrans rouge, vert et bleu.Sa motivation est de renouveler la peinture. En tuant l’art ancien, Rodtchenko vise l’idéologie capitaliste qui avait une emprise sur le marché de l’art et de la peinture de chevalet. L’artiste cherche une relation directe entre l'oeuvre et le spectateur. L’œuvre est matière surface et couleur.Mais les théoriciens de l’époque voient cet acte comme un suicide.Rodtchenko comprend la volonté de Malevitch sur la finalité d’une œuvre et l’amplifie. Avec sa proposition esthétique radicale, il tente de révéler, à travers la pureté de la couleur et de la simplicité des formes, l'essence même de la peinture. Cette oeuvre sera sa dernière peinture. Il se tournera ensuite vers le design, la photographie et le graphisme…

Martin JULES



Yves Klein : le bleu immense et profond

Yves Klein - Blue Monochrome

Yves Klein est un artiste plasticien français du XXème siècle. Yves Klein a aussi consacré une bonne partie de sa vie au judo et aux voyages. A partir de 1940, il commence à peindre des monochromes. Et c’est en 1956, qu’il crée l'International Klein Blue (IKB), le fameux "bleu Klein". Cette teinte est selon lui "la plus parfaite expression du bleu".
Dans ses œuvres monochromes, Klein cherche à éviter toute interprétation d’une forme ou autre chose. Il estime que la couleur, à la différence d’une ligne par exemple, est capable de créer une quatrième, voire une cinquième dimension. Les monochromes de Klein facilitent l'accès à une réalité où le spectateur peut s'établir dans un état permettant la méditation. Avant de se concentrer sur le bleu, Yves Klein a créé des monochromes en feuille d’or et de plusieurs autres couleurs. Puis il a choisi de s’intéresser plus particulièrement au bleu parce que, pour lui, c’est la plus abstraite des couleurs qui stimule la force de l’esprit et l’imagination. Il explique ainsi : « Le bleu n’a pas de dimension, il est hors dimension».

Agathe DESBRIERES

Ad Reinhardt : "Il n'y a rien à voir, que la peinture"


Ad Reinhardt - Ultimate Painting, 1960
Le peintre américain Adolph Reinhardt née en 1913 est reconnu comme le précurseur de l’art conceptuel et de l’art minimal. C’est après des études à l’université Columbia à New York qu'Ad Reinhardt va opter pour l’abstraction. 
Ad Reinhardt

Ce sera à partir de 1960 que l’artiste va produire en série des tableaux noirs, précisément identiques, de format carré de 5 pieds sur 5 avec de légères variantes de valeurs. ses Black Paintings sont divisées en neuf carrés et enduits de couleur noire dont seules varient les valeurs. Il justifie ses œuvres par « moins en art, ce n’est pas moins ». On distingue dans ces toiles une qualité subtile qui rend les noirs pas tout à fait noirs. Les couches de peintures sont innombrables. Reinhardt propose de franchir la frontière qui conduit du sensible au spirituel et au méditatif.
C’est cette nudité picturale assumée, cette rigueur, qui font de lui un artiste majeur du XXème siècle.

Paul HOUBRON

Barnett NEWMAN le monochrome et le sublime

Barnett Newman
Barnett Newman est un artiste américain, représentant important de l'Expressionnisme Abstrait et l'un des premiers peintres de la Colorfield Painting. Dans ses tableaux, dont certains sont des monochromes, on trouve une ligne, un espace vierge, vertical, une marque forte, un « zip », cette fente sensuelle qui vient perturber un aplat uni, qui vient déstructurer la composition si stable, qui amène une faille et focalise notre attention comme pour nous projeter à l'intérieur du tableau. Une relation intime s’établit alors, nous rentrons en contact avec l’œuvre présentée. Pour réaliser ce Zip, Newman place un scotch à peinture sur sa toile et le retire une fois la couleur appliquée. C'est comme une fermeture éclair qui ouvrirait le tableau, la couleur, l'espace…
Quentin FOURAGE


Mark Rothko - la couleur de l'émotion


Mark Rothko, sans titre 1970, acrylique sur toile

Mark Rotho, peintre américain né à Dvinsk (en Russie) le 25 septembre 1903. Classé parmi les représentants de l'Expressionnisme Abstrait américain de son époque, Il crée des peintures où la couleur prend une place primordiale. Proche du monochrome (même si la plupart d’entre ses toiles sont composées de deux couleurs), ses œuvres vibrent provoquant une émotion visuelle chez le spectateur. Il tente d’inventer une peinture qui se débarrasse de la tradition et de tout référent figuratif. La plupart de ses œuvres se résument à quelques rectangles évanescents placés les uns au-dessus des autres. Dans le but de ne pas toucher la perception, mais le jugement du spectateur, l’artiste réduit progressivement la vivacité des couleurs utilisées allant petit à petit vers le gris et le noir.
                                                                                                                                         Baptiste RIOM

Piero Manzoni, Achromes 1957-1963 : la matière blanche

C'est à partir de 1957, date de sa rencontre avec les œuvres d'Yves Klein à la Galerie Apollinaire de Milan que Manzoni se tourna à son tour vers le monochrome.
Piero Manzoni, Achromes 1957-1963
Toutes ses œuvres, intitulées Achromes, dont le sufix a- marque l'absence de couleur, n'ont pour lui rien de symbolique. ils ne les conçoit pas comme des peintures mais plutôt comme des actes de négation, dépouillés de toute interprétation et représentation.
Après avoir expérimenté de manière brève le monochrome sur des panneaux couvert de gesso ou de plâtre, il a développé une technique lors de laquelle il trempe ses toiles dans du kaolin (“argile réfractaire et friable, généralement de couleur blanche, utilisée en particulier dans la fabrication de la porcelaine”) ce qui lui permet de supprimer les coups de pinceau et ainsi son emprunte personnelle dans le processus de création.

Piero Manzoni, Achromes 1957-1963
Dans d'autres séries d'Achromes plus tardives, il décida d'adopter d'autres matériaux comme des carrés de tissus, du coton, des petits pains, du gravier, de la peau de lapin ou bien encore de la laine de verre.
Piero Manzoni, Achromes 1957-1963
C'est grâce et au travers de son journal et de ses travaux que Piero Manzoni a tenté de rejeter la subjectivité de l'artiste et de mettre l'accent sur le geste et l'attitude de l'artiste. On peut considérer qu'il a contribué au développement d'une nouvelle conception de l'art qui souligne la pureté et la simplicité des actes artistiques.
Céverine GIRARD
Piero Manzoni, Achromes 1957-1963

Jan Schoonhoven : vers un art objectif et neutre

Jan Schoonhoven
Jan Schoonhoven est un artiste néerlandais. Il a étudié à l'académie des Beaux-Arts de La Haye. Il a d'ailleurs fait parti du mouvement CoBrA pronant une peinture libre, spontanée, caractérisée par des violents coups de pinceaux ou encore des traînées de couleurs vives. Par la suite, il est influencé par le style de Paul Klee et d'autres artistes. 
Jan Schoonhoven «R 72–25», 1972 Wood, cardboard, paper, latex

En 1957, il fonde avec Armando Jan Henderikse et Henk Peeters le Groupe Informel néerlandais. Puis, en 1960, il fonde le Groupe Nul avec les mêmes artistes. Leur but est de tout reprendre à zéro, c'est à dire de rejeter les techniques de peinture et les matériaux traditionnels. Ils remplacent donc les toiles et peintures par des matériaux industriels.
Il réalise ses premiers reliefs sériels avec une trame régulière. Il utilise uniquement du carton et du papier peint en blanc. L'ordre, la géométrie et les répétitions sont au centre de son style. Il joue sur des reliefs en forme de tuiles plates soulevées. Par conséquent, selon l'emplacement de la lumière, les ombres dues au relief sont plus ou moins importantes.
Coline ROYER

Heinz Mack : faire vibrer la lumière

Heinz Mack, Lichtrotoren, Sonne des Meeres (Rotateur de lumière, soleil de la mer) 1967
Aliminium, 143 x 143 x 17 cm
Né en 1957, à Düsseldorf, à l'initiative de Heinz Mack, Günter Uecker et Otto Piene , le Groupe ZÉRO rassemble des artistes de différentes générations et origines. On y retrouve notamment les grands pionniers de l’avant-garde, ainsi que les artistes du monochrome, Lucio Fontana, Piero Manzoni, Yayoi Kasama, ou encore Yves Klein. « ZÉRO est silence. ZÉRO est commencement. ZÉRO est rond. ZÉRO tourne. ZÉRO est la lune. Le soleil est ZÉRO. ZÉRO est blanc. […] Dynamo dynamo dynamo », selon Otto Piene, dans Die Neue Idealismus, considéré comme le Manifeste ZÉRO, écrit en 1963. Le but de ces artistes étant de faire table rase afin de créer un nouveau langage plastique privilégiant le monochrome, l'installation et la performance.
C'est donc dans cet esprit de commencement et de dynamisme que Heinz Mack a réalisé Lichtrotoren, Sonne des Meeres (Rotateur de lumière, soleil de la mer), en 1967.
Margot ALBERT-HEUZEY

Enrico Castellani : bousculer la surface

Enrico Castellani, Aluminium Surface , 2006, Acrylic on canvas, 120 x 150 cm

Le peintre Enrico Castellani est né en 1930 en italie. Diplômé de l'école nationale des Beaux Arts, il s'interrresse par la suite aux peintures monochromes. Il produira sa première toile en 1959. Brise l'immobilité à travers
Sa technique de ces célèbres Achromes se base sur un monochrome qu'il "extra-fléchies" à l'aide de divers moyens. Il choisit notemant l'utilisation de clous, de cambrure et soulhouettes en bois ainsi que de métal positionnés derrière sa toile. Ses tableaux deviennent alors un véritable théâtre mêlé de lumière et ombres créant mouvement et gris épars. Il brise ainsi l'immobilité d'un simple toile monochrome préférant un tableau rythmé et changeant selon son inclinaison. Cette méthode sur  monochrome est développée à la suite d'une longue et rigoureuse étude, accompagné de Agostino Bonalumi, sur la possibilité de façonner avec ces" extra flechies".  Le jeu s'y s'opèrant trouble et amène à désorienter l'observateur, une expérience intéressante et curieuse qui nous nous amène à penser que le travail du monochrome ...c'est tout un art.
Meggie LE DAIN
Enrico Castellani , Red Surface , 2007, Acrylic on canvas, 100 x 100 cm

Lucio Fontana : lacérer la couleur

La rétrospective Lucio Fontana au Musée d'art moderne de la Ville de Paris, au premier plan "Concetto spaziale, Attese"
Lucio Fontana, connu pour ses toiles lacérées, est un sculpteur et peintre italien associé à l'art informel, créateur du mouvement Spatialiste.
Avant tout sculpteur, Lucio Fontana commence dans les années 50 la peinture. Il peint des surfaces monochromes et les « maltraite » en les fendant ; en réalisant des incisions, des trous. En cela, il a pour but de faire exister l’œuvre non seulement dans les yeux du spectateur mais aussi dans l'environnement qui l'entoure. C'est avec ce types d’œuvres que naît le « concept spatial » (qu'il déclinera et adaptera aussi à ses sculptures).
L'image qui lui est associée est celle de « quelqu'un qui a fait des fentes dans des toiles ». Or, lorsque Fontana réalise ses premières fentes, il a déjà une riche carrière d'artiste. En prenant en compte son âge proche des 60 ans, on peut avoir une toute autre image de son travail ciselé.
L'œuvre est sensuelle
(indépendamment du fait qu'une toile monochrome entaillée évoque souvent quelque chose d'austère et d'abstrait) ; on peut même voir une connotation sexuelle en poussant l'analyse.
Il y a une richesse et une forme de cohérence autour de la lumière et de l'espace. La théorie « spatialiste » est construite
alors sur une réflexion faite autour de l'art, du temps et de l'espace.
La peinture de Fontana dépasse la tradition, et dévoile l'idée, le mouvement, le geste. Elle est insaisissable, navigu
ant sans cesse entre abstraction et figuration 
Jusqu'à la fin de sa vie, Fontana expérimente ses fentes sur différents matériaux (le cuivre, l'alu), différentes couleurs…
Elise CRAIPEAU
Lucio Fontana - 

Fabrice Hyber - Monochrome sensuel


Fabrice Hyber, 1M³ de beauté - 2012

1M² de rouge à lèvres fut une des toutes premières œuvres de l'artiste : il la réalisa en 1981 en utilisant pour seul et unique matériau du rouge à lèvres, créant ainsi un carré rouge d'1m², utilisant 20 tubes de maquillage. En réalisant ce monochrome il questionnait la relation entre les mondes de l'art, du monochrome, de l'esthétique, de la sexualité et de la science ; mêlant ainsi rationnel et irrationnel.
Pour son exposition au Palais de Tokyo en 2012, l'artiste a repris l'idée de sa première œuvre pour la faire évoluer en « 1M³ de beauté » ; un cube d'1m de côté entièrement constitué de rouge à lèvres. Pour cette réalisation, Fabrice Hyber a fait appel à Yves Saint Laurent beauté, qui lui a fourni la matière première de sa pièce.
1M³ de beauté n'est pas seulement une œuvre qui se regarde mais aussi une œuvre qui se vit. En effet le parfum du rouge à lèvres se diffuse dans la pièce, réveillant ainsi les sens du spectateur.
Au travers de ces œuvres, l'artiste a voulu montrer que le rouge à lèvres est quelque chose d'ancré en nous, un symbole fort nous ramenant tous à quelque chose qui nous est propre ;  que même démesuré et sorti de son contexte habituel, le rouge à lèvres, grâce à sa couleur, sa texture, mais aussi son parfum, garde une force visuelle, évocatrice, sensuelle, poétique.  
Chloé CASSABE

Roman Opalka, L'œuvre d'une Vie

Roman Opalka

Roman Opalka a consacré plus de 40 ans de sa vie à une même oeuvre, en effet a partir de de 1965 et jusqu'à la fin de sa vie il va s'intéresser au temps qui passe et qui laisse une trace.
Il va commencer une série de tableaux (tous de 196×135cm) en écrivant en blanc sur fond noir les nombres dans l’ordre croissant. Arrivé au nombre 1 000 000 en 1972, sa méthodologie évolue, il décide de rajouter à chaque nouveau tableau 1% de blanc dans la peinture noire qui compose le fond. Il veille cependant a choisir un blanc différent de celui qu’il utilise pour écrire ses nombres pour que les tableaux, devenus  blanc sur blanc en 2008, restent lisibles. Il complète également son oeuvre en participant a une réelle performance en continu : il s’enregistre en train de prononcer chaque nombre pendant qu’il les peints et se prend en photos à la fin de chaque séance de travail.
Durant ses expositions on peut donc l'écouter réciter ses nombres et observer une série de ses portraits qui témoigne de l'évolution du temps qui passe.
Son immense œuvre “le fini défini par le non fini” s’est achevée avec sa vie, le 6 août 2011 et comporte au total 236 toiles recouvertes de chiffres, Le dernier nombre qu'il a peint est : "5607249" 
Tamara PRUD'HOM
Roman Opalka - Le fini défini par le non fini

Allan McCollum Monochromes de masse

Allan MacCollum Over Ten Thousand Individual Works
Allan McCollum est un artiste contemporain américain qui porte sa réflexion sur les objets issue de la production de masse.
D’un point de vue visuel, ses œuvres ressemblent à celles du Pop Art à cause de son intérêt pour les produit de consommation populaire et au Minimalisme par la répétition et la production en série. Mais son travail est plus sûrement conceptuel et critique, évoquant le principe  «d’appropriation» dans un monde où l’on produit industriellement en série pour une masse d’individus.
Allan McCollum- Over Ten Thousand Individual Works
Sa série intitulée Over Ten thousand Individual Works et une des plus représentatives de son travail.
L’artiste a collecté des centaines de petits objets provenant de foyers, supermarchés… : des cuillères, tasses, boucle d’oreille, petits jouet, taille crayon, etc. Il en fabrique des moules avec lesquels il créé des répliques en plâtre. Puis en combinant les formes initiales,  il recrée des millier d'objets uniques. Les formes sont ensuite peintes puis regroupée par couleur, en collection de 10 000 objets, générant des ensembles monochromes d’objetsAllan McCollum questionne la notion de série et de rareté qui donne cette valeur à l’objet.
On peut aussi y voir une nouvelle approche de l’impression 3D et de la possibilité d’un passage de la production de masse à des produits individuels personnalisés.
Colombe COURGEON

Timothée Talard : quand le monochrome change de couleur

En 2014, la galerie Gourvennec Ogor invite Timothée Talard, jeune artiste plasticien a investir ses locaux. Pour sa deuxième exposition « Chance is a word void of sens, Nothing can exist without a cause », Talard nous propose un travail qui joue sur la perception, utilisant une peinture à la matérialité complexe.
Timothée Talard, « Chance is a word void of sens, Nothing can exist without a cause », 2014, Monochrome 


Son exposition se compose de 10 peintures de couleurs unies. Unies … Pas tant que ça. En fonction de la position et du déplacement du spectateur devant le tableau, l’œuvre change de couleur, passant ainsi du marron au vert, ou encore du violet au orange. 
La peinture qu'il utilise se compose de tous petits pigments à différentes facette. Une seconde couche de produit chimique est ajoutée, ce qui permet à tous les pigment-cristaux de se mettre dans le même sens.  Ainsi lorsque l’on se trouve sur la gauche de la toile, on voit toutes les faces marron des pigments, et en se déplaçant sur la droite on aperçoit toutes les facettes vertes.
Cette illusion d’optique implique le déplacement du spectateur, qui doit bouger pour voir l’œuvre évoluer.
Philippine DEFONT-REAULX