jeudi 13 novembre 2014

Coups de cœur



Nos artistes "coup de cœur"

______________________________________________________________________

Edito
Le "coup de cœur" marque une attirance forte et/ou soudaine pour quelque chose ou quelqu'un. Il se manifeste en fonction de la culture et l'éducation de chacun, il dépend aussi de nos goûts et nos centres d'intérêts. Un coup de cœur comme son nom l'indique peut être temporaire ou permanent.
Dans ce dossier, les étudiants qui travaillent sur ce blog, vous donnent leurs coups de cœur, écrivent sur l'artiste qui les touche, leur parle, les perturbe… Ils souhaitent, tout comme nous, vous faire partager leur coup de cœur.
Quant à nous, éditorialistes d'un jour, notre artiste coup de coeur est Skid Robot. Il fait du Street art de manière très inhabituelle : il graffe avec de la peinture aérosol sur les murs environnant des sans-abris. Il représente ce dont les sans-abris auraient besoin ou ce qu'ils désirent. Ce qui nous a marqué dans sa création, c'est qu'il développe un message politique et social fort, tout en inventant une forme qui renouvelle le Graffiti et le Street art. 
(Antoine Dehillerin et Paul Burgos)
Skid robot- Los Angeles - 2014
________________________________________________________________________

Mon coup de cœur : Frida Kahlo

C'est une peintre mexicaine qui me revient très souvent à l’esprit. Ses peintures comportent une forte identité inspirée de l’art populaire mexicain et intègrent souvent son autoportrait. 
Dans ses tableaux, elle se met à nu, tant au sens figuré qu’au sens propre du terme. Elle expose ses peines et ses douleurs, ses incertitudes avec une représentation très organique qui ne nous laisse pas indifférent. Certaines de ses œuvres qui touchent à des sujets sensibles et à caractère plus intime, tels que l'expérience de ses fausses couches (L'Hôpital Henry Ford, 1932) placent le spectateur dans la position du voyeur. 

La représentation de son propre corps est un élément important dans son travail. Son corps meurtri évoque l’accident de bus à l’âge de 18 ans qui lui laissera des séquelles physiques toute sa vie, mais également marque le début de sa carrière artistique. En tant que spectatrice, je ne m'identifie pas forcément à l'artiste, cependant la force qui transparait dans ses œuvres, me fascine. Il s'agit d'une icône féminine puissante qui s'assume en tant que personnalité forte, mais également comme être vulnérable. 
(Yan Huang)

Frida Kahlo - Hôpital Henry Ford, 1932
Frida Kahlo, La Colonne brisée, 1944
___________________________________________________________________


Mon coup de cœur : Cy Twombly



Artiste émergent du monde artistique des années 1950, Cy Twombly est un new yorkais qui apporta à l’art son approche personnel de la peinture et de la sculpture. L’histoire antique méditerranéenne se trouve être l’inspiration principale de son travail, focalisant les mythes gréco-romains, ainsi que la poésie épique au centre de son univers. Nombreuses de ses œuvres sont des métaphores, elles représentent les iconographies, les mythes, elles en sont les représentations à la manière de Cy Twonbly.
Décédé en 2011, à l’âge de 83 ans, il laisse derrière lui un demi siècle de révolution. Il aura survolé le débat entre abstraction et figuration, mis en question le rôle de l’écriture dans la peinture, entre primitisme enfantin et psychanalyse ; son œuvre bouscula le XXe siècle.
C’est au Tate Modern Museum de Londres, que son travail me fut dévoilé. Il s’agit d’un don qu’il fit au musée selon ses souhaits post mortem. Offrant alors trois grands tableaux "Untitled" (Bacchus) peints entre 2006 et 2008, ainsi que des sculptures en bronze réalisées entre 1979 et 1991.
Bacchus est certes un thème récurrent dans le travail de Cy Twombly, cependant, son œuvre est puissante, notamment les tableaux. Ils sont réellement imposants, tout comme le dieu qu’ils représentent. La couleur rouge, rappelle le vin dont il est l’emblème, la force du mouvement de rotation qui y est représenté, ne fait que renforcer l’ivresse permanente du dieu de la fête qu’est Bacchus.

Son œuvre nous plonge dans son ivresse, et pour notre plus grand plaisir nous empêche de revoir la surface.  
(Estelle Muller)

Cy Twombly - Untitled (Bacchus) 2006 - 2008

Cy Twombly - Untitled (Bacchus) - 2006 - 2008

Cy Twombly - Untitled (Bacchus) 2006- 2008
_______________________________________________________________________


Mon coup de cœur : Jean-Michel Basquiat

«Believe it or not, I can actually draw. »


Nerveux, violent et énergique sont des mots qui peuvent résumer tant l’art que la vie de cet

artiste. Américain (né à Brooklyn le 22 décembre 1960), Basquiat eut un intérêt pour l’art dès son plus jeune âge. Il s’exerça sur les murs de Manhattan en tant que graffeur à l’âge de 17 ans. « SAMO », pour « SAMe Old shit », était sa signature avec son ami Al Diaz en 1977. 

Adolescent perturbé, il arrêta les cours. Banni du domicile de son père, il finit par vendre des T-shirts et des cartes postales dans les rues de New York. Continuant à peindre dans les rues, il s’attaqua aux murs de SoHo où il inscrira cette fois ci: « SAMO is dead » (1979), mettant ainsi un point final à sa période graffitis. Cependant, cette vague l’aura propulsé au devant des plateaux télévisés, l’aspect provocateur de l’artiste aura charmé la scène d’art d’East Village (Manhattan).
Toute cette renommée lui vaudra un rôle dans un des films de Glenn O’Brien (« Downtown 81 »), lequel lui fera rencontrer l’artiste le plus célèbre de l’époque : Andy Warhol. Basquiat et Warhol se lièrent très vite d’amitié, et une collaboration entre eux ne tarda pas à s’installer. René Ricard, célèbre journaliste, écrira un article sur le jeune prodige « The Radiant Child » dans Artforum. Basquiat est désormais populaire et commence ça première exposition chez Annina Nosei en 1981. Ses multiples travaux seront exposés aux côtés des plus grandes figures néoexpressionnistes (Barbara Kruger, Keith Haring…). Au bout d’une année, Jean-Michel Basquiat quitte la galerie et sombre dans la drogue. Celui-ci refait surface en 1983 à la Biennale du Withney Museum of American Art, il est consacré "plus jeune artiste jamais rencontré à cette exposition". Il entame ensuite une série de voyage, montrant ainsi son talent aux yeux du monde. En effet, Basquiat passera du temps à Hawaï (1984), l’île de son père. Il exposera ensuite en Côte d’Ivoire (1986). Le décès d’Andy Warhol affectera profondément l’artiste, Basquiat disparait des regards, et se fait une place dans l’ombre. Il réapparait à New York en 1988, réprenant ainsi les expositions. Sa dépendance à l’héroïne lui vaudra un séjour à Hawaï en centre de désintoxication. Dix jours après son retour à New York, il s’éteint dans son appartement suite à une overdose le 12 août 1988.
On se souvient encore de son style unique alliant couleurs vives, textes provocateurs, corps en transparence, squelettique, visages masqués. Ses œuvres mises bout à bout reflètent sa vie, ses influences et états sentimentaux. Basquiat est la définition du mot « spontanéité », je pense qu’il n’est surement pas juste mon coup de coeur, mais celui d’un nombre incalculable de personnes. 
(Nicolas Boda)
Jean Michel Basquiat "Cabeza" 1982


Jean Michel Basquiat - Dos Cabezas"-1982

 Graffiti : SAMO : "Same old shit" 1976



Jean- Michel Badsquiat - Phillistines - 1982

__________________________________________________________________


Mon coup de cœur : Jackson Pollock


Jackson Pollock, également connu sous le nom de « Jack the Dripper » (Jack l’égoutteur) est un artiste américain du XXe siècle. Il a marqué son époque en tant que peintre expressionniste abstrait. 

Il se munit d’un simple pinceau et projette de la peinture de façon aléatoire avec un mouvement rapide et sans reprise sur sa toile blanche. Il traduit le mouvement, c’est-à-dire le déplacement d’un corps dans un espace et la vitesse à sa manière. Cela crée des œuvres singulières, c’est sa manière d’évacuer sa tension. A travers ses tableaux, on ressent un sentiment d’explosion, de chaos créé avec toutes ces projections de peintures colorées. Je trouve cet artiste très original, il se distingue des autres artistes de son époque. Il joue avec sa propre technique et réussit à transmettre beaucoup d’émotions. 
(Pauline Disloquer)
Jackson Pollock, photographie de Hans Namuth, 1950

Jackson Pollock - Number 31, 1950 - 269,5 X 530,8 cm - Huile et peinture d'émail sur toile - The Museum of Modern Art, New York
________________________________________________________________________


Mon coup de cœur : Gustav Klimt



Gustav Klimt est un artiste autrichien phare de la fin du XIXe et du début du XXe siècle. Né en 1862 à Baumgarten près de Vienne, Klimt est le fils d’un graveur et d’une chanteuse. 
Ce cadre familial artistique est probablement une des raisons pour lesquelles Klimt intègrera l’école des arts décoratifs de Vienne en 1876. Il en sort diplômé en 1883 et se lance dans une carrière de décorateur. 
Rapidement, il atteint une certaine renommée en temps que peintre décorateur et se voit confier de grands travaux. En 1894 il reçoit une commande officielle pour le plafond du hall de l’université de Vienne. Pour celui-ci il produira ses premières œuvres que l’on pourrait qualifier de polémique : la Théologie, la Philosophie, la Médecine et la Jurisprudence, elles sont effectivement une à une reçues plus que froidement par le public et la critique. Ces œuvres seront d’ailleurs détruites pendant la première guerre mondiale.


Reconstitution du plafond de l’université de Vienne tel qu’il a été pensé par Klimt. La Médecine dans l’angle supérieur gauche, ainsi que la Philosophie dans l’angle inférieur gauche, la Théologie dans l’angle supérieur droit et enfin la Jurisprudence dans l’angle inférieur droit.

Vers la fin des années 90, Klimt prend part à la naissance du mouvement de l’art nouveau autrichien, la « Sécession » ainsi qu’à celle de son journal porte parole, « Ver sacrum » (Printemps sacré).
La Sécession a pour objectif premier de donner à l’art autrichien une reconnaissance internationale mais aussi de combler le fossé existant entre l’art et les arts considérés comme mineurs. 
À partir de ce moment là Klimt s’éloigne de la profession de peintre décorateur pour peindre ce qu’il lui plaît vraiment et exprimer ses goûts pour l’art moderne, le symbolisme et l’impressionnisme français.
Lors de cette période, Klimt produira ses œuvres les plus mémorables tels que Pallas Athena ou encore Le Baiser qu’on pourra associer à sa période « dorée ». En effet les travaux de Klimt seront pour la plupart pourvus de cette couleur à laquelle on l’associera souvent par la suite, le doré. Le tout donne un effet très clinquant, une façon comme une autre d’attirer l’attention. Cependant au delà de cette couleur caractéristique, ce sont plutôt les sujets choisis et la façon de les retranscrire qui sont intéressants dans l’œuvre de Klimt. La femme sera l’objet principal de ses différents tableaux. Malgré le fait qu’il utilise très peu la perspective ou les rajouts de matière, Klimt arrive à donner l’image d’une femme voluptueuse et légère. Klimt met la femme en avant en ne la peignant plus seulement pour représenter une déesse ou une allégorie, il la peint pour elle-même. La femme n’est plus un moyen mais bien une entité à part entière. Bien entendu cette façon quelque peu décalée d’appréhender le sujet lui vaudra d’être largement controversé.


Gustav Klimt- Le Baiser, huile et feuille d’or, 1908-1909

Cette façon de représenter la femme est d’autant plus évidente lorsqu’on enlève les fioritures, le surplus, le doré comme dans cette gravure réalisée pour Ver Sacrum.



Le Sang de poisson publié dans la revue "Ver Sacrum", encre, Gustav Klimt, 1898


Il mourra en 1918 apoplexie.
(Margot Lenorais)

________________________________________________________________________


Mon coup de cœur : Jean Dubuffet 
(1901-1985)

A partir de 1942, Jean Dubuffet se consacre pleinement à sa vie artistique et crée des images et des volumes « primitifs » par la suite qualifiés « d’art brut ». Il fut le premier à tenter d’inscrire les oeuvres de solitaires indemnes de toute formation artistique dans une catégorie qui était celle de la liberté de créer hors de toute influence académique. C’est ce propos qu’il développera jusqu’à la fin de sa vie. D’après lui, il lui fallait s’exonérer des règles du monde de l’art, Il méprisait l’idée même d’un monde de l’art officialisé.

J’ai découvert cet artiste pour la première fois au fond Hélène et Edouard Leclerc à Landerneau. Une exposition intitulée « Dubuffet, l’insoumis » lui était dédiée. J’aime son univers enfantin et expérimental ainsi que le regard qu’il porte sur son propre travail.
La majorité de ses oeuvres étaient présentes dans l’exposition c’est pourquoi j’ai vite perçu le pouvoir de cet artiste à se remettre en question. Il s’est petit à petit approprié un univers, un style bien remarquable par sa singularité. Au premier abord, on pourrait croire à des dessins ou des petites constructions d’enfants jusqu’à ce que ses pièces prennent de l’ampleur et deviennent monumentales. La série « L’Hourloupe » m’a d’abord intéressée par son côté systématique (hachures noires et aplats de bleu, rouge, blanc) puis par sa simplicité à expliquer l’évolution d’un personnage depuis sa naissance jusqu’à sa maturité dans un environnement enfantin et géométrique. On peut effectivement se mettre à la place de ce personnage grâce aux silhouettes présentes dans chaque installation. Ce qui m’a également plu chez Dubuffet, est l’accessibilité qu’il donne à ses créations. Il n’y a pas de code ou de règles pour comprendre son travail. Il est tel qu’on le voit, sans artifice, BRUT. 

(Clémence Pujo)
Jean Dubuffet travaillant dans son atelier.



Photographie prise lors de l'exposition "Dubuffet, l'insoumis", Sculpture : Paris Circus - L’Hourloupe (1961 – 1974) 
_______________________________________________________________________



Mon coup de cœur : Pierre Soulages
Pierre Soulages est né le 24 décembre 1919 à Rodez en France. Cet artiste a été très influencé par les travaux de Cézanne et de Picasso mais également celui de Marc Rothko avec qui il se lie d’amitié et partage les mêmes convictions et envies lors de son séjour à New York. C’est en 1946 qu’il consacre tout son temps à la peinture jusqu’à aujourd’hui ; il est l’un des rares artistes encore vivant à pouvoir voir un musée s’ouvrir à son nom, le musée Soulages à Rodez dans sa ville natale où il a même participé à la scénographie.
Soulages est un artiste qui me tient à cœur car son travail n’a cessé d’évoluer tout au long de sa carrière devenant de plus en plus intéressant et captivant à mon goût. Ce qui me semble intéressant dans son travail c’est son honnêteté ; comme l’explique l’artiste ses peintures ne renvoient à rien d’autre que ce qu’elles sont. Nous ne sommes pas dans l’interprétation, ni dans un art conceptuel mais bien dans une peinture vraie qui se traduit par la technique, la qualité du geste et la couleur. Il travaille toujours avec un pigment noir qui donne une profondeur à la toile. Ce qui rend ces grandes toiles magiques, c’est le rapport entre support et lumière. Effectivement tout le travail de Soulages tourne autour de cette thématique : comment travailler la lumière ? C’est ce noir qui permet un tel travail car il est la seule « couleur » à refléter aussi bien la lumière, permettant un jeu de formes et de reflets.  
Pour cela l’artiste teste toutes les façons possibles de jouer avec la lumière en donnant une texture à la peinture. Il créé ainsi ses propres outils pour donner des effets : rayés, ronds, fins, gros etc au pigment… Ces aplats épais de peinture ressemblent alors à des tissus, ou des morceaux de cuirs brillants. C’est ce qui donne une dimension supplémentaire à ses peintures. Pour moi, ce que l’on ressent face à ces toiles immenses est unique et différent de tout les autres styles que j’ai rencontré auparavant. 
(Alice Delsenne)
Pierre Soulages - Diptyque - 1979
Polyptyque - 1989 (détail)
_____________________________________________________________________

Mon coup de cœur : Tony Orrico


Cet ancien danseur classique, réalise aujourd’hui de nombreuses performances. Ses outils : un support, deux crayons et son corps. Ses seules limites sont celles du support et de son corps. Son corps est son premier outils de création, précis et régulier. Les deux bras fonctionnent en symétrie, les pieds suivent et permettent la rotation du corps. Tel un compas, le corps définit ses limites sous formes circulaires.

L’artiste s’installe, quelques coups de crayons, une légère rotation et ça y est le mécanisme est en marche. Il prend fin lorsque pieds et bras sont noircis de crayon. Ces performances se déroulent à la manière de chorégraphies maitrisées et précises. Les performances sont toutes aussi belles que le résultat final. En effet, on apprécie autant le spectacle que l’empreinte laissée sur le papier. Il y a dans ces performances quelque chose de physique mais aussi d’artistique et de gracieux. Le corps rentre comme en fusion avec le papier et devient presque un rouage fonctionnant grâce à sa propre énergie.

Tony Orrico repousse les limites du corps en travaillant sur la simultanéité de ses membres et la régularité de ses actions. Il prouve ainsi que le corps humain est proportionné et peut devenir un outil rythmé.

(Claire Brélivet)
Photographie de Michael Hart, réalisée en 2011 

Tony Orrico, Penwald Drawings
________________________________________________________________________



Mon coup de cœur : Christo et Jeanne-Claude 



Christo et Jeanne Claude sont un couple d’artiste nés le même jour, le 13 juin 1935, l’un en Bulgarie et l’autre au Maroc. Ils ont vécu la plupart de leur vie à New York. 

Ces artistes ont contribué à faire sortir l’art des musées pour l’exposer dans le paysage ou l’intégrer à l’espace urbain. 

Au début de leur carrière, ils commencent à empaqueter des objets de la vie du quotidien et à leur conférer une sorte d’aura poétique. On décèle le fondement de leur future pensée artistique. Leur rêve d’enveloppement d’un bâtiment verra le jour en 1995 quand ils recouvreront le Reichstag, à Berlin, 6 ans après l’ouverture de la frontière entre l'Allemagne de l'est et l'Allemagne de l'ouest. Ils auront défendu leur idée pendant près d’un quart de siècle. 

Ce que j’apprécie beaucoup, c’est de voir l’énergie mise en œuvre pour réaliser leurs œuvres et à faire accepter le changement qu’ils vont appliquer dans l'espace pendant un certain laps de temps. Pour réaliser des projets de l’ampleur de Surrounded Island ils ont eu besoin d’une capacité de persuasion politique, d’une logistique digne d’un état major, le tout financé par la vente des collages et des dessins préliminaires. Ainsi ils sont le parfait exemple de l’expansion de l’art et de son intégration réussie dans le milieu urbain. 

Leur action est très souvent de modifier un objet ou un paysage. C’est une modification flagrante, très voyante, mais pourtant cette modification va toujours amener une certaine mise en valeur, une poésie, une réflexion.

Prenons le Reichstag emballé. C’est un bâtiment extrêmement connu. Il y eut la construction, puis la démolition du mur de Berlin et tout ce qui en suit. En découvrant le bâtiment emballé, les gens ont été obligés de faire appel à leurs souvenirs, de se replonger dans l'histoire ou peut être aussi de faire fonctionner leur imagination. Les artistes mettent en avant le fait que quelque chose de matériel peut avoir une retombée immatérielle. Et je trouve que la façon dont ils l'ont fait est tellement simple et paradoxale, mais en même temps efficace et relativement facile d’approche, touchant autant les personnes intéressées par l’art que celles qui n'y connaissent rien. Cette pièce a eu un impact sur la vie de millions de personnes. 

Prenons maintenant Running Fence. Cette œuvre s’étend sur 40 km le long des lignes serpentines des collines californiennes. Pour connaître le parcours de la voile dans son ensemble, il fallait soit faire marcher son imagination ou réussir à prendre de la hauteur.
Leurs projets sont incomparables. Peu d’artistes ont, de leur vivant, la chance de financer eux même des projets d’une telle envergure. Je ne sais pas si c’est un point négatif ou non (et je penche pour le non) mais ils ont aussi réussi à satisfaire une esthétique assez traditionnelle, en cherchant une harmonie entre leurs réalisations et le paysage, entre l’art et la nature. Ainsi Christo et Jeanne-Claude furent pour moi une porte d’entrée dans l’art contemporain. Un art dont la démarche permet assez facilement d’être comprise, ou de faire débuter une réflexion.
(Pauline Bernard)

Christo et Jeanne Claude - Running Fence croquis (1976)


Christo et Jeanne Claude - Running Fence 1976


Christo et Jeanne Claude - Surrounded Island - 1983






________________________________________________________________________




Mon coup de cœur : Jeff Koons



Celui que l’on présente comme le successeur d’Andy Wharol est surement l'homme le plus businessman de tous les artistes vivants. Toujours présenté en costume, Jeff Koons possède un atelier à New-York regroupant 130 personnes qui travaillent pour lui. Il pense ses œuvres mais n’en a réalisé aucune d’entre elles. C’est également l’artiste vivant vendu le plus cher dans le monde.

Cet américain de 59 ans, qui fait revivre le pop’art, est essentiellement connu pour ses œuvres monumentales représentant des ballons de différentes formes. Dans ces sculptures, Jeff Koons en appelle aux souvenirs d’enfance du spectateur tout en cassant le coté temporaire du ballon de baudruche qui doit, en temps normal, se dégonfler. On a l’impression d’une certaine légèreté et pourtant, dans le cas de Balloon Dog, l’œuvre en acier chromé pèse plus d’une tonne. Le coté brillant et réfléchissant de l’acier chromé joue avec le lieu d’exposition. Quand le spectateur bouge, la réflexion bouge, et les couleurs  se modifient.


Jeff Koons - Balloon Dog - Série célébration (1994-2000)

Devant les Gazing Balls, le spectateur a l’impression qu’un enfant a oublié son ballon sur des sculptures antiques. Ces balles viennent également casser le rythme de la statue par leur couleur et leur matière.

Jeff Koons - Gazing Ball - 2013

Cependant Jeff Koons ne travaille pas uniquement l’acier chromé. Il fait réaliser presque pour chacune de ces œuvres un tableau la représentant et a également réalisé des scupture moins enfantines comme Woman in tube
(Camille Renard)

Jeff Koons - Tulipes - 1998



Jeff Koons - Woman in tube -1988
________________________________________________________________________



Mon coup de cœur : Paul Klee 
(1879 - 1940)
Paul Klee est mon artiste coup de cœur car son art n'a jamais cessé d'évoluer. Il n’a pas vraiment de périodes dans ses œuvres. Il a vérifié les principes des impressionnistes pour ensuite les intégrer à son expérience. Il crée des œuvres figuratives à l’aquarelle puis s'intéresse à la théorie de l’abstraction. Il travaille avec Kandinsky avec qui il entretient une correspondance pendant la première guerre mondiale. Il abandonne l’abstraction et se lance dans l’illustration de poèmes chinois. 

Par la suite, étant musicien, il cherche à lier peinture et musique dans l’idée d’un « rythme pictural » où il propose d'observer les mouvements d'un chef d'orchestre, le rythme régulier du corps créant des figures, etc… Il structure son tableau comme une partition de musique.

Vers la fin de sa vie, il souffre d’une infection maligne de la peau, et la perspective de la mort le paralyse quelques temps, puis il se lance dans un nouveau style pictural sur de grands formats. Ces toiles traduisent son angoisse face à la mort.

Une citation d’Antoni Tàpies traduit bien pourquoi Paul Klee est mon coup de cœur : 

« Klee que nous voyons plonger totalement ses racines dans la tradition romantique et symboliste, est d'un autre côté toujours plus proche des avancées les plus récentes de la peinture. Son œuvre est faite d'aller et retours, de vagues qui fluent et refluent, ignorant l'anecdote, la circonstance et les modes qui se démodent. »
(Laurila Burrati)
Mort et Feu (1940), huile sur papier, Centre Paul Klee, Berne
"Senecio", huile sur toile de 1922 

________________________________________________________________________


Mon coup de cœur : Victoria Siemer

Victoria Siemer, de son nom d’artiste « Witchoria » est une designer graphique originaire de Brooklyn, à New-York. Elle réalise des séries de photographies qui nous transportent dans un autre univers. Ses clichés nous poussent à nous poser des questions sur ce que l’on voit, sur ce que l’on vit, à nous remettre en question. Elle réalise plusieurs séries de photos toutes regroupées sous le nom de  Human errors . Ce qu’elle déclare dans ses photos est que les erreurs humaines ne peuvent pas être réglées en quelques clics. 

Elle met souvent en jeu des textes, des mots dans ses photos, qui peuvent parfois être pleines d’humour, comme dans Nope ou moins joyeuses comme dans It was written in the stars

L’une de ses séries est un ensemble de paysages avec une mise en abîme. En effet, sur une même photo, on observe le lieu et une réplique de celui-ci à l’envers qui donne l’impression ou l’illusion d’être réalisée à l’aide de miroirs. Cela donne un côté magique au lieu, l’impression d’un autre monde similaire au notre.

Ce qui est intéressant, c’est que l’on retrouve aussi, dans l’univers photographique de Witchoria, des références (plus ou moins décalées) à notre monde aujourd’hui très connecté. Prenons par exemple la série Wish you were here : sur des photos en noir et blanc, elle ajoute le symbole qui représente la localisation géographique via internet (une sorte de petite punaise). Elle met ainsi en relation avec une certaine ironie le passé et le présent. Dans la continuité de ce travail, on peut remarquer une autre série de photo reprenant les sentiments que tout un chacun peut éprouver à travers des fenêtres d’ordinateur. Tout comme si étions devenus un système informatique. 
(Constance Chambaud)
Victoria Siemer - Smells like teen spirit, 2014



Victoria Siemer - It was writen in the stars, 2014



________________________________________________________________________

Mon coup de cœur : Soasig Chamaillard


Soasig Chamaillard est une artiste qui réussit à nous émouvoir en détournant des statues très endommagées de la Vierge Marie.
Influencé par une éducation occidentale catholique, son travail n'est en rien provocateur. L'artiste redonne une seconde vie à ces objets extrêmement abîmés. Les messages transmis nous renvoient à la femme et au monde actuels. Chaque pièce est créée à partir d'une réflexion précise basée sur la consommation, la publicité, l'amour ou encore la maternité.
Ses œuvres sont réalisées grâce à un travail très minutieux. Le nettoyage de chaque pièce est indispensable et consiste à enlever toutes les aspérités et autres défauts présents. Il s'effectue par un "grattage" délicat du plâtre. L'artiste choisit ensuite quels éléments remplacent les absents et quels éléments sont ajoutés. Ces modifications sont réalisées par une technique de travail de la résine maîtrisée. Soasig Chamaillard nous propose à la fin de chacun des ses "détournements" des pièces uniques qui nous charment par leurs références et par les souvenirs qu'elles peuvent refaire surgir. Cette histoire débute par un cadeau. De cette surprise paternelle, souvenir de brocante, et de sa passion du Japon, naîtra la première "apparition", Sainte Geisha. Les créations se poursuivent tantôt rétro, tantôt poétique, tant folklorique.
Certaines de ces transformations sont emplies de charme, d'autres effleurent ou ravivent des souvenirs d'enfance, il en existe même qui vous transportent dans un monde auquel vous ne penseriez. Leur point commun est ce détournement curieux, insolite et original. Mais leur plus grande magie, celle de l'artiste, est qu'elles m'ont toutes envoutée. 
(Claire DUGAST) - octobre 2014 

Remerciements à la Galerie Albane
Photographies des sculptures présentées par la Galerie Albane (1, rue Suffren 44000 Nantes)
Sainte geisha : premier détournement

Pokemum : réalisé à partir d'une Vierge à l'enfant, où l'enfant portait un globe
détail



Déchirement 
Nymphe : réalisé à partir d'ailes de papillon mort conservés grâce à la résine.  

                    
________________________________________________________________________

Mon coup de cœur :  Wim Delvoye

Dans son grand atelier de Gand (Belgique), trois ou quatre assistants s'activent autour de Wim Delvoye. Ce belge d'origine des Flandres est né en 1965. L'artiste est aujourd'hui internationalement connu et traite de sujets très divers.

Il s'est fait connaître avec "Cloaca", une "machine à fabriquer de la merde". Delvoye explique qu'il souhaitait au départ créer une machine nulle, puis il lui a fait produire des excréments en reproduisant le processus digestif. "J'ai cherché un truc compliqué, difficile à faire, et cher, et qui ne mène à rien."

L'artiste s'est intéressé à plusieurs problématiques notamment celle de l'art sur le vivant. Ils est propriétaire depuis d'une ferme en Chine dans laquelle il élève des cochons tatoués. Ils seront ensuite naturalisés et exposés. L'artiste reprend les codes d'une culture populaire dans ces tatouages, comme régulièrement dans son travail. (Le logo de Cloaca utilise la typographie de coca-cola.) "Je voulais réaliser une œuvre qui s'enracine dans la société et qui ne soit pas morte et encadrée. Le cochon, il mange, grogne, chie, se fait remarquer !" explique Delvoye.

Wim Delvoye, "Tim Steiner", exposition Wim Delvoye au Louvre, 2012
Wim Delvoye, Art Farm China, 2007
Toujours sur la question de l'art vivant, Wim Delvoye a tatoué le dos de Tim Steiner, celui-ci devenant "porteur d’œuvre d'art". A la vente de l'œuvre en 2008, 150 000 euros sont partagés entre une galerie, l'artiste et le porteur. Un contrat prévoit son exposition régulière.

Wim Delwoye, "Louise", Art Farm, 115X59X37, 2004

Ce qui me plait au delà de ses réalisations chez Wim Delwoye, c'est son discours lucide sur l'art et sa manière de le désacraliser.

Il en parle dans cette vidéo : 

"L'art doit être toujours prestigieux, c'est pour cela que j'adore jouer avec des objets qui n'ont aucun prestige: comme une bonbonne à gaz, une pelle, une merde, aucun prestige dans ces choses." explique t-il.

"Les gens pensent qu'ils sont athées mais ils sont religieux dans autre chose. Ils croient que l'amour est éternel, ils ont des principes, ils adorent l'art. Ils regardent l'art avec trop de respect dans les musées, c'est trop religieux. (...) Un tableau où on ne voit rien, c'est qu'il n'y a rien dedans, et depuis 100 ans, on pense qu'il y a quelque chose dedans qu'on doit sentir avec beaucoup d'exercices et de connaissances… "
Parmi ses autre œuvres, les X-rays (images radio de scènes pornographiques), des bonbonnes de gaz peintes à l'antique, un camion-bétonnière en teck sculpté style 17e.... Ses divers projets n'ont souvent aucun lien entre eux, si ce n'est beaucoup d'auto-dérision, d'humour et de provocation.

Le site de l'artiste, présentant sont travail est très drôle et mérite l'attention : http://www.wimdelvoye.be/

(Emilie Bétune)

________________________________________________________________________

Mon coup de cœur : Marina Abramovic


Marina Abramović (1946 - ) est une artiste qui s’exprime par le biais de performances troublantes et émouvantes, en repoussant les frontières du potentiel physique et mental.
Sa collaboration pendant plus de douze ans avec Ulay (Frank Uwe Laysiepen, artiste performeur et son compagnon à l’époque) a beaucoup marqué son œuvre. 
En effet, ils ont développé ensemble la notion d’art corporel (body art) à travers des performances toutes aussi conceptuelles les unes que les autres. Ils cherchaient à représenter les limites corporelles par des actions souvent brutales et répétitives (ont foncé corps contre corps à répétition, se sont giflés pendant des heures, sont restés assis dos à dos et cheveux liés pendant plus de seize heures… etc.).
Leur dernière performance commune La grande promenade de mur (1988) symbolise la fin de leur histoire : ils ont tous deux longuement marché sur la Muraille de Chine en partant chacun de l’une des deux extrémités jusqu’à ce qu’ils se rencontrent, s’enlacent et se quittent.
Marina Abramović se met également en scène seule, dans des situations souvent extrêmes, comme dans Rythm 0, où elle offre son corps aux spectateurs qui sont alors libres d’en faire ce qu’ils souhaitent. De multiples objets étaient à leur disposition : du rouge à lèvres, une scie, des couteaux, des allumettes, du miel, une rose, un pistolet, une balle… etc. A la fin de la performance, l’artiste s’est retrouvée à moitié nue, coupée, peinte, couronnée d’épines et on lui avait braqué un pistolet chargé sur la tempe.
The Artist is Present englobe la rétrospective de Marina Abramović au MOMA de New York (2010) et le film qui date de 2012.
Durant les trois mois de l’exposition, sept heures par jour et six jours sur sept, l’artiste a invité les visiteurs à s’asseoir un par un en face d’elle, de l’autre côté d’une table, sans leur parler, échangeant avec eux uniquement par le biais de regards parfois d’une telle intensité qu’ils déclenchent leurs larmes. 
Dans une autre partie de l’exposition, des étudiants reprenaient ses œuvres les plus célèbres (comme celle où elle apparaît nue avec un squelette, celle où elle est comme crucifiée, nue, sur une croix invisible, … etc.).
Marina Abramović est souvent représentée comme la “Grand-mère de l’Art Performance. Elle touche un large public et inspire même des personnalités comme Lady Gaga ou Jay-Z. Elle est et restera un pilier dans le monde de l’Art.
(Célia Ferrer)

"Relation in Time" 1977, avec Ulay

"Rythm 0" 1974
"The Artist is Present" 2010



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire