mercredi 22 octobre 2014

Marcel Duchamp, La Peinture, même


ÉDITO




 "Que le goût soit bon ou mauvais, cela n'a aucune importance, car il est toujours bon pour les uns et mauvais pour les autres. Peu importe la qualité, c'est toujours du goût."  C’était là le point de vue de Marcel Duchamp.

Au Centre Georges Pompidou, L’exposition, La Peinture, même, ouverte de Septembre 14 à janvier 2015 apporte un regard nouveau sur l’œuvre abondante de Marcel Duchamp. Contre toute attente, ce ne sont pas les fameux Readymade (objets déjà faits, choisis et transformés par l’artiste) qui sont mis en avant, mais, au contraire, son œuvre picturale. L’exposition permet aussi de découvrir ses sources d’inspiration notamment scientifiques, techniques, livresques et picturales.

La peinture, même rassemble une centaine d’œuvres réparties dans huit salles : climat érotique, des nus, apparition d’une apparence, détérioration du cubisme, pudeur mécanique, inconscient organique (mécanique viscérale), « peinture de précision et beauté d’indifférence », le grand verre. [Margot LENORAIS et Constance CHAMBAUD]
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BIOGRAPHIE


« J’ai eu une vie absolument merveilleuse. »   Marcel Duchamp

Portrait de Marcel Duchamp




Marcel Duchamp (1887 – 1968), était un homme de lettres et un peintre plasticien français et américain (dès 1955).
Il fait son apprentissage de la peinture au sein du Groupe de Puteaux (formé avec un cercle d’amis), principalement des artistes d’inspiration cubiste comme Fernand Léger ou Albert Gleizes.
Cependant en 1912, sa peinture se rapproche plutôt d’un futurisme italien avec “Le Nu descendant l’escalier”.
Il invente par la suite le ready-made - des objets tout-faits qu’il sélectionne pour leur neutralité esthétique- comme la célèbre Fontaine (1917), un urinoir renversé sur lequel il appose la signature “R. Mutt”.
Il s’insère dans le mouvement dadaïste avec l’œuvre La Mariée mise à nu par ses célibataires, même ou le Grand Verre (1915-1923).
Marcel Duchamp fait également quelques apparitions dans l’univers surréaliste : il figure par exemple dans le Numéro 2 de la revue “Le Surréalisme au Service de la Révolution” (1930-1933) lancée par André Breton et éditée par José Corti.
Un artiste polyvalent et provocateur, qu’André Breton a qualifié "d’ homme le plus intelligent du siècle”. [Célia FERRER]

Portrait de Marcel Duchamp

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DEUX NUS 

1910

Peu connu, Deux nus, est une peinture issue d’une série de nus réalisée par Marcel Duchamp en 1910. Elle est une représentation naturaliste d’une première œuvre portant le même nom. Elle a un esprit "fauve". Ces toiles n’ont été découvertes par le public qu’à la fin des années 1940, elles étaient auparavant confinées dans le cercle familial. Elle est représentative des débuts du peintre qui se cherchait artistiquement. Les coups de pinceaux sont grossiers et peu précis, on devine les visages et les formes. Le contraste des couleurs quant à lui est plus fort, la représentation de corps très pâles sur fond vert de nature, avec des touches d’orangé accentue le contraste et rappelle la chevelure d’une des protagonistes. La peinture représente deux femmes nues (ceci expliquant le titre de l’œuvre Deux nus). La diagonale qui la construit énonce une opposition dans le tableau. L’une des femmes nous tourne le dos, la seconde nous fait face. Cependant sa composition indique qu’elles s’attirent, le cadrage resserré de l’œuvre nous fait pénétrer dans leur intimité. [Estelle MÜLLER]
Deux femmes nues, huile sur toile - 1910


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BAPTÊME

1911


Il s'agit d'une huile sur toile (91,4 x 65,1 cm), réalisée par Marcel Duchamp en 1911. Elle est conservée au Philadelphia Museum of Art. Elle appartient à "The Louise and Walter Arensberg Collection".
Le Baptême (1911) fait partie d'un trio de peintures représentant un cycle : Buisson, Paradis, Baptême, exposé au Salon des Indépendants en avril de la même année. Le bassin situé en bas du tableau, ainsi que la nudité des femmes évoquent le thème du baptême. De style post-symboliste, l’œuvre met l’accent sur la transmission de l'idée par rapport à sa représentation. Les personnages aux formes charnues sont reproduits dans des positions peu naturelles dans un décor abstrait. La femme à la peau couleur ambre, fortement surélevée et de manière écrasante, suscite chez le spectateur une impression de lourdeur. [Yan HUANG]

Le baptême, huile sur toile 91.4x65.1 cm, 1911 

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JEUNE HOMME ET JEUNE FILLE DANS LE PRINTEMPS

 1911, huile sur toile


En 1911, la sœur de Marcel Duchamp se marie et se voit offrir une toile particulièrement intrigante par son frère, Marcel. Complexe et mystérieuse, cette œuvre offre plusieurs lectures possibles et suscite notre curiosité grâce aux nombreux détails cachés. On peut y voir au premier plan deux silhouettes élancées qui nous rappellent Adam et Eve devant l’arbre de vie. Adepte du symbolisme à cette époque, Marcel Duchamp cherche à retranscrire dans cette œuvre la métamorphose fille-femme et l’union de deux êtres. En effet, nous distinguons des figures triangulaires, rondes ainsi que des fruits à l’arrière plan qui nous laissent penser que le fruit du mariage est la maternité. Au delà de ces interprétations, le propos principal de l’œuvre reste l’union d’un homme et d’une femme associé à la nature. [Clémence PUJO]


Jeune homme et jeune fille dans le printemps, huile sur toile 65.7x50.2 cm, 1911


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JEUNE HOMME TRISTE DANS UN TRAIN

1911, huile sur carton (100 X 73cm),  Musée Solomon R. Guggenheim à New York 


En 1911, Marcel Duchamp peignit « Jeune homme triste dans un train ». Cela fut sa première œuvre de la série fondée sur la traduction du mouvement. Il s’intéressa et s'inspira du cubisme et du futurisme pour traduire le déplacement d'un ou de plusieurs corps grâce à la superposition de lignes, de différentes lumières, des couleurs et des formes géométriques. En effet, dans son œuvre, nous remarquons qu'il a choisi d'utiliser une palette sobre et superpose plusieurs lignes et formes qui dynamisent la toile. Le résultat est concluant, on aperçoit deux mouvements différents. Ainsi, grâce à la multiplication de lignes et de formes, le train donne l'impression qu'il va en avant, comme s’il allait sortir de la toile ! Cependant on aperçoit tout de même un mouvement inverse traduit par des lignes allant contre le train tandis qu’ à l'aide d'une palette plus sombre inspirant un univers mélancolique il illustre l'homme avec une cigarette dans un environnement obscur. On remarque aussi que Duchamp s'est inspiré de la chronophotographie en superposant plusieurs images pour traduire l'idée de mouvement. [Pauline DILOSQUER]
Jeune Homme triste dans un train" ( 1911), peinture à l’huile sur toile montée sur carton

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NU DESCENDANT UN ESCALIER  N°2 

1912


Nu descendant un escalier, huile sur toile, 146x89 cm, 1912

Nu descendant un escalier est une huile sur toile de Marcel Duchamp peinte en 1912. Ce tableau correspond à une période plutôt cubiste de l’artiste mais où ses inspirations futuristes sont présentes. Nu descendant un escalier est une des ces toiles qui a été peinte comme par curiosité, comme une recherche du mouvement et de la vitesse à la manière de Giacamo Balla ; mais surtout en s’inspirant de la chronophotographie (série de photographie découpant le mouvement). Son inspiration première fut le travail du photographe Muybridge (1830-1904), on pourrait même y reconnaître le modèle et sa posture sur le tableau de Duchamp. Dans cette toile, c’est le dégradé de couleur descendant qui nous indique un mouvement mais aussi les formes géométriques répétées comme pour schématiser un modèle. On pourrait presque y voir une machine plus qu’un nu artistique car ici, à la manière d’un futuriste, Duchamp nous montre l’idéal industriel en décomposant l’homme telle une machine et en abandonnant tous canons esthétiques classiques. Cette œuvre marque le début de l’art moderne et fait de Marcel Duchamp le fondateur d’un nouveau genre d’art à tel point qu’il est difficile de catégoriser son travail. [Alice DELSENNE]


Giacomo BALLA, speed of a motorcycle, 1913, huile sur toile


MUYBRIDGE, Femme descendant des escaliesr, 1887



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LES JOUEURS D'ÉCHEC

1911


Dans cette peinture, Marcel Duchamp a peint ses deux frères Jacques Villon et Raymond Duchamp-Villon disputant une partie d’échecs. Cette œuvre met en avant les recherches cubistes de Duchamp dans les années 1910. Nous pouvons voir la démultiplication des formes qui peut faire penser aux théories futuristes. Il a créé une toile cubiste où tout est morcelé comme sur les cases d’un échiquier en utilisant la technique de la "démultiplication" : les pièces d’échecs s’éparpillent sur toute la surface du tableau.

Cette peinture tient beaucoup à cœur à Marcel Duchamp car lui-même était un grand joueur d’échecs. Il disait même : «Je suis venu à la conclusion personnelle que bien que tous les artistes ne sont pas les joueurs d'échecs, tous les joueurs d'échecs sont des artistes." [Laurila BURATTI]


Les Joueurs d'échec, huile sur toile 50x61 cm, 1911




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LE ROI ET LA REINE ENTOURÉS DE NUS VITES 

1912

« […] Aux Échecs, quand on parle d’une belle résolution à un problème, cela provient d’une pensée abstraite qui se résout dans la forme physique d’un Roi faisant cela ou d’une Reine faisant ceci. Comme si une chose abstraite était rendue vivante. Reine ou Roi deviennent des animaux qui se comportent selon une pensée abstraite mais vous voyez la Reine faire cela – vous sentez une Reine faire cela – vous la touchez… alors qu’une beauté mathématique reste toujours abstraite […]. » Marcel Duchamp
Cette peinture fut réalisée en 1912 par Marcel Duchamp et fait partie d'une série de plusieurs études sur la mécanique et le mouvement. Deux personnages et une auto est la première étude au fusain de cette série, précédant Deux Nus : un fort et un vite. La troisième étude nommée Le Roi et la Reine traversés par des Nus vites introduit pour la première fois dans cette série le sujet du jeu d'échec. Au premier abord, le titre: Le Roi et la Reine entourés de nus vites est déroutant et la peinture d'autant plus. Ni l'un ni l'autre ne nous permettent de réellement comprendre le sujet de la peinture. C'est en s’intéressant à ses passions et aux études faites au préalable que l'on comprend que le roi et la reine dont il est question, sont en fait les pions du jeu d'échec. En effet Marcel Duchamp était un fervent joueur d'échec car : « Je l’ai pris très au sérieux, dit-il, et je m’y suis complu parce que j’ai trouvé des points de ressemblance entre la peinture et les échecs ». Les nus vites sont quand à eux la représentation visuelle du déplacement des pions et du mouvement des joueurs. Dans l'ensemble de ces études, l'artiste a cherché à montrer la désarticulation du mouvement à la manière de la chronophotographie. L'artiste cherche à exprimer le mouvement et sa décomposition, ce qui se traduit par quelque chose d'assez déstructuré et géométrique. En effet, le mouvement des pièces rend leur visualisation floue et presque désarticulée. Pour cette œuvre, le spectateur a l'impression de pénétrer les pensées des joueurs et de visualiser les coups qui vont être joués, un mélange à la fois de réel et d'irréel, de figuratif et d'abstrait. Il est peut être intéressant de faire un rapprochement avec l’œuvre de Stefan Zweig, le joueur d'échec, dont le sujet principal est un homme qui, pour échapper à son enfermement, va mentalement recréer des parties d'échec pour pouvoir psychologiquement s'évader. On imagine alors une combinaison entre la visualisation mentale de ce personnage et la peinture de Duchamp, comme étant la retranscription physique de sa pensée. [Claire BRELIVET]


Le Roi et la Reine entourés de nus vites, huile sur toile 146x89 cm, 1912


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LA MARIÉE

1912


La Mariée est une œuvre réalisée par Marcel Duchamp en août 1912 dans le cadre d'une série d'études faites pour le « Grand Verre » à New York, trois ans plus tard.
Cette peinture est une huile sur toile, format portrait, mesurant 89,5x55 centimètres, elle fait maintenant partie de la collection Louise et Walter Arensberg au Philadelphia Muséeum of Art, à Philadelphie.
Le tableau est une représentation d'une mariée vue par Duchamp totalement dépourvue de réalisme et plutôt construite grâce à des éléments mécaniques et des formes géométriques. L'artiste a beaucoup développé son art autour du cubisme et la peinture cinétique cependant sur cette toile, il affirme avoir modifié sa méthode de travail "Remplaçant la main levée par une technique d'extrême précision, je me lançai dans une aventure qui ne serait plus tributaire des écoles existantes".
On perçoit tout d’abord l’œuvre par les jeux de lumières, de contrastes, et de formes, puis en se penchant sur les détails, on distingue le déhanchement d’un être étrange formé de différents espaces géométriques ou non. Le ton très jaune et lumineux de la toile invite les yeux des spectateurs à se balader entre les dégradés et les contrastes de couleurs et de formes. Le tableau est très dynamique en raison de la présence de droites qui rigidifie un peu la composition mais donne de la vitesse à sa lecture. La Mariée n’appartient pas vraiment à un mouvement précis car elle est une expérimentation, une transition entre le Cubisme et le Futurisme, effectuée par Marcel Duchamp.
On peut peut-être faire un lien avec les œuvres de Georges Braque lors de sa période de Cubisme analytique, en effet, « Violon » et « Bach » présentent beaucoup de superposition de lignes et de formes dans leur composition, ainsi que la « Mariée ». [Paul BURGOS]



La Mariée, 89.5x55.25 cm, 1912

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LA MARIÉE MISE À NU PAR SES CÉLIBATAIRES MÊME

1915-1923


Au premier abord en regardant l’œuvre, on peut très vite se retrouver confus et se sentir déstabilisé devant cette installation composée de deux panneaux de verre superposés qui sont peints à certains endroit à l’huile, qui comprennent des inserts en plomb et de la poussière à d’autres endroits.

La Marié mise à nu par ses célibataires même ou encore Grand Verre commencé en 1910 est déclarée inachevée par l’artiste en 1923 : Dans un entretient avec Robert Lebel, il révèlera qu’il s’est inspiré d'un stand de fête foraine de province où l’on devait lancer des  projectiles sur une représentation de femme en robe de mariée (référence au jeu du Chamboultou) dans le but de la mettre «à nue» tandis que dans un autre entretien accordé à Lewis Jacob il explique que cette œuvre doit énormément à l’un des poèmes de Raymond Roussel, Impressions d’Afrique (1910).

Chaque détail de cette œuvre a été calculé et travaillé dans de nombreux dessins préparatoires très poussés. Marcel Duchamp y laissa la poussière s'y «déposer» pendant un an et demi afin d’obtenir une certaine qualité picturale avec la présence du verre. Quelques temps plus tard il nettoiera son "Grand Verre" en laissant certains endroits où il fixa la poussière ce qui donna ainsi à l’installation une légère coloration jaunâtre.

Cette œuvre suscite beaucoup d’attention, de suppositions et restera sans nul doute un des objets d’art les plus énigmatiques de l’histoire. [Aurélia MAURIN]

La Mariée mise à nu par ses célibataires même



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ROTATIVE PLAQUES DE VERRE (OPTIQUE DE PRÉCISION)

1920- 1979

En gros les rotatives sont des sortes de grosses machines en plexiglas, parfois peintes, en métal, en bois, et sont actionnées par un moteur. La question que Duchamp soulève est : L’art peut-il être aussi un objet qui s’inspire de la technique ? Mais aussi est ce qu’un objet manufacturé peut devenir un œuvre d’art ?  Les Rotatives sont un nouveau chapitre dans l’art de Duchamp. En fait, Duchamp est toujours à la recherche d’une manière de représenter ou de présenter le mouvement (Dulcinea, Nu descendant de l’escalier, Roue de Bicyclette). Il a également le souci d’explorer les frontières entre les dimension spatiales, celles qui nous font passer du plan à la profondeur et prennent en compte la notion de temps.  Sur sa Rotative, il installe plusieurs plaques de verre  de différentes longueur qui, quand elles sont en mouvement, dessinent des formes circulaires mouvantes fascinantes, proposant une nouvelle perception de la vision. [Pauline BERNARD]








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ANÉMIC CINÉMA

1925-26


Marcel Duchamp est connu pour ses peintures et ses œuvres plastiques. Il ne faut pourtant pas oublier Anémic Cinéma, une œuvre cinématographique unique en son genre.

Cette œuvre singulière s'inscrit dans le mouvement Dada. Anémic Cinéma n'est autre qu'un court-métrage de 1926 d'environ sept minutes alternant dix séquences de cercles concentriques et neuf séquences de contrepèteries, également concentriques. Man Ray et Marc Allégret ont participé à la réalisation de ce film atypique dépourvu de scénario, de même que Rrose Sélavy (son double féminin) à qui l'on doit ces phrases étonnantes. Le titre du film, palindrome imparfait, annonce déjà la couleur de la production. Cette réalisation s'avère être un savant mélange de La Roue de bicyclette de 1913 et des Rotoreliefs conçus également par Marcel Duchamp.

Anémic Cinéma est le témoin d'un intérêt flagrant du plasticien pour l'optique. [Claire DUGAST]



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ROUE DE BICYCLETTE

1913


D’une simple roue de vélo, Duchamp réinventa à lui seul, une nouvelle façon d’appréhender l’art. Las des représentations picturales et de ses exigences techniques, celui-ci finira par définir l’art comme étant le pur et digne fruit de nos pensées, s’étendant bien au delà des prouesses de pinceaux qui par ailleurs, étaient déjà bien épuisées par des siècles de peinture. Ce sera donc l’idée qui primera sur la manière. Pour ce faire, l’artiste imagina le «Ready Made» (déjà fait). Concept réalisé à partir de matériaux manufacturés. Sa Roue de bicyclette devient sa première œuvre du genre. Une roue de vélo fixé par le biais de sa fourchesur un tabouret peint. À l’état brut, démunie de pneus, elle tourne et porte son ombre sur le mur, derrière elle. Présenté de la sorte, l’objet a alors perdu toutes ses caractéristiques initiales, le faisant passer du stade d’objet fonctionnel à œuvre d’art. Cette sculpture, en plus d’être l’une des premières œuvres de l’art cinétique, sera le point de départ d’une grande série et inspirera de nombreux artistes tant pour ses qualités visuelles qu’intellectuelles. Pour Marcel Duchamp, cette roue symbolise un nouveau cycle  "J’aimais la regarder tourner comme j’aime regarder le mouvement d’un feu de cheminée."

Il faudra aussi noter que la sculpture originale fut égarée, l’auteur réalisa donc dans les années 1960 des répliques de celle-ci. [Nicolas Bodas]

Roue de bicyclette, 1913



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LE READY-MADE, DÉFINITION


Le Ready-made est défini comme un "objet usuel promu à la dignité d'objet d'art par le simple choix de l'artiste" par Marcel Duchamp, son inventeur (article "Ready Made" dans le Dictionnaire abrégé du surréalisme).
Duchamp utilise ce terme pour la première fois dans une lettre à sa sœur Suzanne: "Ici, à N.Y., j'ai acheté des objets dans le même goût et je les traite comme des « readymade » tu sais assez d'anglais pour comprendre le sens de « tout fait » que je donne à ces objets – Je les signe et je leur donne une inscription en anglais."
Cette pratique remet en cause les notions de virtuosité ou de savoir faire dans l'art, ici l'œuvre prend substance dès lors qu'on la nomme et l'exhibe. On peut considérer que le premier ready made apparaît en 1913 avec Roue de Bicyclette, une œuvre de Marcel Duchamp composée d'une roue de bicyclette sur un tabouret que l'artiste définit comme "ready-made aidé" car il est intervenu sur l'œuvre en associant les deux objets. « Quelques fois j'ajoutais un détail graphique de présentation : j'appelais cela pour satisfaire mon penchant pour les allitérations, « un ready-made aidé » en anglais : ready-made aided. Une autre fois, voulant souligner l'antinomie fondamentale qui existe entre l'art et les ready-made, j'imaginais un « ready-made réciproque » en anglais : reciprocal ready-made) : se servir d'un Rembrandt comme table à repasser ! » explique Marcel Duchamp.


Porte bouteille, 1914 et Fontaine, 1917

Il définit parfois cette œuvre comme une "sculpture sur socle", à la manière de Brancusi, son ami. La capacité hypnotique de l’œuvre "Roue de Bicyclette" s'inscrit dans un réel intérêt de l'artiste pour le mouvement, depuis "nu descendant l'escalier", 1912, jusqu'à "anemic cinéma", 1925.
Le premier ready-made strict de l'artiste serait alors le "Porte-bouteilles" 1914. Le plus célèbre restant "Fontaine" 1917.
Le ready-made marque de façon indélébile l'art et en particulier la sculpture. Il a toujours sa place dans l'art contemporain.
Damien Hirst, par exemple, artiste britannique né le 7 juin 1965 à Bristol (Angleterre) réalise des installations traitant du rapport entre l'art, la vie et la mort. Il utilise la technique du ready-made et travaille souvent avec des cadavres d'animaux: cochons, vaches, moutons, requins, tigres...



Damien Hirst, The Incredible Journey, 2008

Jeff Koons, l'artiste vivant vendu le plus cher au monde actuellement, a beaucoup exploité les produits de consommation et cherché à comprendre pourquoi et comment ces objets étaient "glorifiés". Il a ainsi exposé des aspirateurs sous des vitrines de verre, ainsi que plusieurs objets issus et représentatifs de la société moderne.

Cette technique ironise la société de consommation, la magnifie, et fait entrer les objets de notre quotidien au musée, sous verres et projecteurs. Mais en ce sens le ready-made désacralise l'art, peut-être de la même façon que Wim Delvoye vend les excréments produits par Cloaca, on achète aujourd'hui un concept, une idée de l'art. [Émilie BÉTHUNE]

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LHOOQ 

1919



LHOOQ, 1919



L'œuvre L.H.O.O.Q de Marcel Duchamp créée en 1919 est une reproduction de La Joconde de Léonard de Vinci. L'artiste intervient sur cette reproduction en ajoutant à Mona Lisa une moustache et un bouc. Cet ajout, signature dadaïste, tend avec ironie à désacraliser l'art. L'artiste utilise volontairement une icône de l'art très célèbre pour en faire une réinterprétation personnelle. De plus, le titre de l'œuvre L.H.O.O.Q ["Elle a chaud au cul"] est un allographe qui rajoute un côté provocateur et humoristique à l'œuvre ce qui est l'inverse du travail sage et sacré de De Vinci. De nombreux autres artistes ont revisité La Joconde comme Banksy ou Aurélie avec IL.H.O.O.Q qui nous montre Ben Laden. [Antoine DEHILLERIN]

Banksy- La joconde armée, Londres 1990

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LA BOÎTE EN VALISE

1935-41


La Boîte en valise, 1936-41


Entre 1936 et 1941, Marcel Duchamp entreprend le projet de réunir certaines de ses œuvres dans un format miniature et de les  regrouper dans des valises. 

L'idée de Duchamp est de rendre ses œuvres portatives et de broyer les pistes entre objet d'art unique et reproduction d'œuvres existantes en implantant l'œuvre dans œuvre elle-même.  

Il réalise ainsi plusieurs valises comportant 69 reproductions de ses œuvres. Ces boites- valises sont entièrement réalisées en carton, bois, papier et plastique et se déplient pour exposer au spectateur trois panneau. Ainsi, la structure de l'œuvre se suffit à elle-même en terme de présentation aussi bien pour montrer les reproductions ou les masquer. 

On retrouve ainsi dans l'une de ses boites en valise, une miniature de Nu descendant l'escalier, Broyeuse de chocolat et des miniature de ses ready- made comme Fontaine ou encore Air de Paris.  [Camille RENARD]












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