samedi 13 décembre 2014

La mort dans l'art


La mort dans l'art


La fascination que l'on porte à la mort traverse les temps. Elle est puissante au Moyen-âge où les grandes épidémies de peste décimaient toute l’Europe. Cette obsession correspond sans doute autant à la peur, à l'angoisse, qu'au mystère qu'elle représente.
Les danses macabre, qui mêlent morts et vivants, sont des réflexions sur la vie et la morts, peut-être aussi un moyen d'en rire…
Au XVIIème siècle, les «Vanités» mettaient en scène des crâne, dans des nature morte pour suggérer la précarité de la vie terrestre.
L’horreur des guerres et au XXe siècle celle des camps de concentration marquent de leurs empreintes les artistes qui tentent de représenter l'irreprésentable…
Entre jeu, fascination, effroi, dérision, l’art nous invite à nous interroger sur notre condition humaine, notre faiblesse et notre désir d’immortalité. 

[Coline Hercouet - Amélie Galcera]

Personnification

Thanatos
Thanatos, dans la mythologie grecque, est le Dieu de la Mort. Fils de Nyx (la nuit) et frère jumeau d’Hypnos (le sommeil), il vit, selon Hésiode, dans le Tartare (le séjour des morts), devant la porte des enfers. Des récits relatent son unique défaite contre Héraclès, plus connu sous le nom d'Hercule, qui l’attacha avec des chaînes de diamants à la porte des enfers pour sauver Alceste.
Il est bien souvent représenté par un physique disgracieux voir hideux, avec différents attributs tels que des ailes et un flambeau renversé. A cela s’ajoute, une urne qui contiendrait les cendre des défunts, ainsi qu’un papillon symbolisant l’emblème de l’espoir d’une autre vie. Par la suite, de nombreux sculpteurs lui ont attribué la faux comme unique objet symbolique, signifiant que la vie est moissonnée comme le blé.
Ce Dieu fascinant a été actualisé dans un manga. Le célèbre manga de Masami Kurumada, Saint Saiya, en France connu sous le nom des Chevaliers du Zodiaque, reprend l’univers des Dieux Grecs avec comme personnages Héra, Hadès, ou bien encore Thanatos. Ce dernier est dépeint comme un être froid et sans compromis, il fait parti également des chevaliers dit invincibles, car personnifiant la mort personne ne l’a jamais vaincu. Cependant, ses traits diffèrent des représentations grecques. Il est revêtu d'une cuirasse noir saillante, majestueuse, et a le visage d’un jeune homme mince et bien fait, mettant en avant sa force et sa robustesse. Thanatos sera vaincu par le héros de l’histoire, traduisant sans doute ce fantasme universel qui nous traverse tous, celui de vaincre la mort.
[Pauline Juitteau]
Hypnos et Thanatos by Bernd Brunner
Thanatos - Les Chevaliers du Zodiac
La Jeune Fille et la Mort, Hans Baldung 1517

On peut retrouver un certain nombre de versions de La Jeune Fille et la Mort. Le tableau de Hans Baldung sur ce thème a été peint en 1517. Il a choisi de représenté la mort sous la forme d'un cadavre décharné, agrippant une jeune fille par une mèche de ses cheveux. La mort l’attire vers la tombe creusée à ses pieds, indiquant du bras cette même direction. La jeune fille est nue et reste immobile, sans se débattre. Les larmes coulent sur son visage, elle comprend qu’il n’y a plus aucune autre issue pour elle.
Hans Baldung avait déjà réalisé d’autres œuvres sur ce même thème. On ne peut nier qu’à l’époque ce genre de sujet intéressait les peintres. Cela leur donnait un prétexte pour représenter des corps dénudés. Néanmoins, on peut interpréter plus sérieusement ce sujet ; La rencontre de la jeune fille et de la mort permet d’aborder le côté éphémère de la beauté du visage, du corps, et de la virginité qui se perdent et se meurent …
[Perrine Bader]

La Jeune Fille et la Mort de Hans Baldung 1517 


détail

Les danses macabres

La Grande Danse macabre - Hans Holbein (environ 1530)

Au moyen Age, la mort, qui est très présente à cause des guerres et des maladies comme la peste, effraie les populations. On retrouve dans l’art, de nombreuses œuvres traitant de la mort. Les danses macabres constituent le sujet de représentations théâtrales populaires. Souvent, elles sont représentées dans les œuvres d’art comme une farandole tragique et comique où se déplace et danse un cadavre décharné ou un squelette, qui est entouré par des Hommes de différentes classes sociales.
Hans Holbein, réalise une série de 41 gravures dans les années 1530 appelée La Grande Danse de la mort. Dans l'une d'elle, on observe un squelette retenant un homme par le bras. Leurs postures rythment le tableau par les mouvements des corps. L’homme veut avancer mais le squelette l’en empêche. Ici, on met en scène la mort dans le monde du travail, elle peut surgir à n’importe quel moment. Hans Holbein, veut changer la représentation de la danse macabre en montrant l’idée d’une lutte individuelle et quotidienne face à la mort.
[Mathilde Pointeau]

La grande danse macabre- 37 le marchand ambulant - Hans Holbein (environ 1530)


La mort et son territoire


Le Triomphe de la Mort, Peter Bruegel l’Ancien

En 1562, Peter Bruegel l’Ancien peint Le Triomphe de la mort. Cette peinture, donne à voir un environnement hostile, un paysage terrifiant qui semble participer à l'oeuvre de la mort. Le paysage est asséché, quasi sans végétation. On aperçoit au second plan des ruines.
Bruegel a théâtralisé la mort et l'a représentée sous différentes formes (maladie, crime, suicide, exécution, combat…). On retrouve la personnification de la mort sous la forme de la faucheuse, mais aussi une référence aux Parques (trois sœurs de la mythologie grecque qui tiennent les fils du cours de la vie).
Par-dessus tout, l’artiste cherche à dépeindre les attitudes des hommes devant la mort : certains tentent de se battre alors que d’autres préfèrent se cacher. Même ceux qui se tournent vers l’Eglise n’échappent pas à la mort.
Enfin Bruegel rappelle que la mort est universelle, et que personne ne peut y échapper, pas même le roi.
[Neha Hassanbay]
Le Triomphe de la Mort

La Mort aveugle


La Mort faucheuse aux yeux bandés : artiste inconnu - XVIIème siècle

La Mort faucheuse aux yeux bandés est une illustration réalisée par un artiste inconnu au 17 ème siècle. A cette époque de maladie (peste) et de trouble, la mort est souvent représentée comme un squelette portant une toge noire à capuche et différents accessoires. Les variantes possibles sont : le cheval, l’instrument de musique, l’arc et flèche, et la faux. Dans le cas de ce dessin, deux caractéristiques sont réunis (arc-flèche-faux), ce qui est assez rare. De plus la représentation de la mort est singulière : la silhouette est androgyne représentée sous forme humaine. En général la mort était illustrée par un squelette ou bien un cadavre en décomposition pour transmettre la peur et l’horreur. Les yeux bandés sont un clair symbole: elle fauche tout sans discernement, personne n’est à l’abri de la Mort.
[Charlotte QUESNEL]
La Mort faucheuse aux yeux bandés

Vanités

Philippe de Champaigne ( 1602-1674)

Philippe de Champaigne est un peintre français classique, né en 1602 à Bruxelles, et mort en 1674 à Paris. Au début du XVIIème siècle apparait dans la peinture classique un tout nouveau genre classé dans le genre de la nature morte : les vanités. Ces tableaux mettent en scène des groupes d’objets qui symbolisent l’inutilité des bien terrestres, du pouvoir et de l’argent et l’écoulement du temps.
La Vanité au crâne de Philippe de Champaigne suit une composition très rigoureuse et symétrique : Le fond noir laisse apparaitre de façon très distincte les trois objets répartis sur trois grandes lignes. Tous trois sont des représentations imagées de la mort : la tulipe qui semble déjà se faner, (elle nous rappelle le vieillissement et les transformations du corps et la vie qui s’affaiblit), le crâne qui semble nous regarder fixement avec noirceur (comme une façon de signifier que la mort se trouve face à nous), et le sablier représentant le temps qui s’écoule. Ce tableau de Champaigne pousse à la réflexion nous parlant du temps qui passe, du vieillissement et de la mort, comme du temps qui nous reste et que nous devons penser à utiliser au mieux…
[Julie BIGOT]

Philippe de Champaigne, Vanité au crâne ou Allégorie de la mort, première moitié du XVIIe, huile sur bois 28x37, musée de Tessé, Le Mans

La mort du héros

La Mort de Marat de Jacques Louis David 1748-1825

La Mort de Marat peinte en juillet 1793 par Jacques Louis David (1748 - 1825) est une huile sur toile de 165x128 cm. Le tableau est conservé aux Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique à Bruxelles.
Cette œuvre néoclassique représente l'assassinat de l'homme politique français Jean-Paul Marat par une jeune femme royaliste, Charlotte Corday.
Le tableau ne met pas l’accent sur l’atrocité de la mort dans ce qu’elle a de sombre ou de morbide mais évoque plutôt le sacrifice. Marat surnommé « l’ami du peuple » mena un combat politique contre le roi puis contre les girondins, pendant la révolution française. La qualité du tableau, sa beauté et son harmonie, rendent ici un hommage à Marat. Cette composition sobre et puissante de Jacques Louis David sacralise ce martyr révolutionnaire et installe Marat en fervent défenseur de la Liberté.
[Jocelin VERGA]
La Mort de Marat - Jacques Louis David - 1793

Cadavres & dissection

Théodore Géricault / Etudes de pieds et de mains (1817-1819)

Théodore Géricault est né le 26 septembre 1791 à Rouen d’une famille aisée et décède le 26 janvier 1824 à Paris d’une chute de cheval.
Pour l’Etude de Pieds et de Mains, Théodore Géricault réalisa de nombreux travaux sur des membres coupés entre 1817 et 1919, période qui correspond à l’élaboration de sa plus grande œuvre : Le radeau de la Méduse. Géricault aurait pratiqué ces dissections à côté de son atelier, à l’hôpital Baujon, à Clichy. L’artiste présente ces « morceaux anatomiques » à la manière d’une nature morte avec un réalisme que l’on pourrait définir de tragique. Cette fascination  pour le "fragment" est caractéristique de l’école romantique. Ici, Géricault pousse cette passion jusqu’aux confins de l’horreur.
Théodore Géricault avait un goût maladif pour l’horrible. Dans Etude de Pieds et de Mains, il cherche à capter la décomposition lente et progressive des chairs humaines.
Par sa maitrise et sa sobriété extrême, ce tableau est une œuvre de référence pour les artistes. Celle-ci confirme la place que Géricault occupe dans l’art du XIXe siècle français.
[Arthur Godet]
Théodore Géricault - Etude de pieds et de mains (1817-1819)

L'horreur des camps

Zoran Music - Dessins de Dachau

Zoran Music, peintre et graveur est né à Gorizia, en Dalmatie, en 1909. Accusé d'être un membre de la résistance en 1944, il fut arrêté par la Gestapo et déporté dans le camp de Dachau. Les deux années qu'il y passa déterminèrent toute son œuvre à venir. Lors de sa captivité il réalisa, au risque de sa vie, une centaine de dessins décrivant ce qu'il voyait: "Une vie de tous les jours dans un brouillard, ombres et fantômes bougent". Des scènes de pendaison, les fours crématoires, les cadavres empilés par dizaines...
"Je dessine comme en transe m'accrochant morbidement à mes bouts de papier. J'étais comme aveuglé par la grandeur hallucinante de ces champs de cadavres."
C'est entre 1970 et 1975 que l'artiste reviendra sur son séjour à Dachau. Il grave et peint alors une série intitulée "Nous ne sommes pas les derniers".
[Clémence DU CLEUZION]
Zoran Music, gravures et peintures de la série « Nous ne sommes pas les derniers. », 1970 

Zoran Music, gravures et peintures de la série « Nous ne sommes pas les derniers. », 1970

Zoran Music, gravures et peintures de la série « Nous ne sommes pas les derniers. », 1970


Performance

Marina Abramovic, 1946

Marina Abramovic, née en 1946 en Yougoslavie, est une artiste plasticienne connue pour repousser les limites du potentiel physique et mental. Faisant partie du courant artistique de l’Art Corporel, ses performances osées et brutales, l'ont souvent mené loin jusqu'à dépasser ses limites physiques ou psychologiques. Elle se définit elle-même comme « la grand-mère de l’Art Performance », forme artistique interdisciplinaire qui trouve son origine dans des mouvements d’avant-garde de la première moitié du XXe siècle.
Dans cette œuvre, Marina Abramovic est habillée de noir et porte sur son dos un squelette. Elle y évoque notre condition d’être vivant, et le poids de la mort en tant que vérité inéluctable et universelle.
"Je suis intéressée par l'art qui dérange et qui pousse la représentation du danger. Et puis, l'observation du public doit être dans l'ici et maintenant. Garder l'attention sur le danger; c'est se mettre au centre de l'instant présent." Marina Abramovic
[Elise HUNEAU]

Marina Abramovic - Carrying the skeleton – 2008

Nature morte

Pablo Picasso, Nature morte aux oursins, Paris, Musée Picasso, 1946

Dans cette toile Picasso qui a vu mourir plusieurs de ses amis exprime la fragilité des choses humaines face à la mort inexorable. En effet, plusieurs détails de la toile le montre : la lampe est éteinte faisant allégorie au souffle d’une vie qui s’achève et au fait que le temps est court et fuit au côté de la mort. De plus, le style géométrique et l’utilisation des noirs, des blancs et des gris s’accordent au thème du deuil et créent une atmosphère pesante et sinistre. A priori, le seul élément qui renvoie à la réalité sont les oursins, qui pourraient être un souvenir de son voyage à Antibes où il a peint « La joie de vivre », toile qui met fin aux tableaux sombres de la guerre.
[Justine SUTTEAU]
Pablo Picasso, Nature morte aux oursins, Paris, Musée Picasso, 1946

Dénoncer

Les chaises électriques de Andy Warhol (1928 - 1987)

Andy Wahrol est un célèbre artiste du Pop-art qui a choisi de traiter le sujet de la mort en réalisant une série de sérigraphies de chaises électriques. Il utilise une photographie où la chaise électrique est placée au milieu d'une salle de mise à mort à l'atmosphère froide. Aucun corps ne figure dans le siège.
Cette image est traitée de manière "sale", avec une mauvaise définition photographique, elle semble mal cadrée. Par le procédé de la sérigraphie, il la tire avec des couleurs à chaque fois différentes.
Il choisit d'utiliser un symbole typiquement américain en le traitant de la même manière que ses autres œuvres, comme sa célèbre Marilyn Monroe.
Warhol voit dans la chaise électrique un symbole de la société américaine des années 1960. En effet, de nombreux faits politiques, sociaux ont eu lieu comme l'assassinat de John F. Kennedy par Lee Harvey Oswald. Puis en 1960, un mouvement de protestation contre la peine de mort s’est développée. Warhol inclut le symbole de la Chaise électrique dans ses œuvres, peut-être comme moyen de contestation. A travers son œuvre, il nous transmet sa vision pessimiste de la société américaine.
Dans la série d’Electric Chair, Andy Warhol a procédé de différentes manières. Avec différentes couleurs, et aussi des ajouts de matières (des coups de brosse par exemple)
Pour moi, son choix de mêler couleurs vives et objet de mort est astucieux. A la fois, il fait de la chaise électrique une "icône"  tout en critiquant la violence de la société Américaine.
[Charlotte de Rafélis]


Big Electric Chair - Warhol - 1967

Big Electric Chair - Warhol - 1967

Big Electric Chair - Warhol - 1967


Les approches contemporaines

Subodh GUPTA (1964) - Very Hungry God

Né en 1964 en Inde, Subodh Gupta réalise des sculptures et installations inversant le rapport entre modernité et archaïsme. Il propose ici une gigantesque "vanité" sous la forme d’un crâne composé exclusivement d’ustensiles de cuisine indienne. Il a été réalisé avec environ 3000 pièces. Installée dans l’église Saint-Bernard - lieu symbolique du mouvement des sans-papiers-, cette œuvre affirmait sa dimension spirituelle et communautaire. Les visiteurs ont été invités à partager une soupe végétarienne indienne (langhar) organisée par l’artiste dans le square en face de l’église.
[Louise ROBERT]
Sculpture de crâne humain en vaisselle inoxydable. A Nuit blanche, Eglise St Bernard, Paris (75) Collection F. Pinault.
Damien Hirst, 1965

Damien Hirst, né le 7 Juin en 1965, est un artiste anglais, entrepreneur, collectionneur d'art et supposé l’artiste en vie le plus riche du Royaume-Uni. Depuis la fin des années 80, Hirst a utilisé une pratique variée d'installation, de sculpture, de peinture et de dessins afin d'explorer la relation complexe entre l'art, la vie et la mort.
En 2007, Hirst a réalisé For the Love of God, une de ses œuvres les plus importantes et les plus connues. Le travail a consisté à jeter du platine sur un véritable crâne humain agrémenté de 8601 diamants. Le coût de l’œuvre s’élève à £ 14,00 0,000. Le crâne a été acheté chez un taxidermiste de Londres et des recherches indiquent qu'il est daté du 18ème siècle et probablement celui d'un homme de type européen âgé de 35 ans. Le titre de l'œuvre provient des exclamations proférées par sa mère lors de la découverte de ses précédentes œuvres, elle disait : « Pour l'amour de Dieu, que vas-tu faire la prochaine fois ! ». Son travail est considéré être un Memento mori, ce qui est le latin pour "N’oubliez pas que vous allez mourir", ce qui est en fait un rappel à notre mortalité et de la fragilité de l’existence sur terre. Hirst dit de la mort  : "Vous ne l'aimez pas, de sorte que vous la déguisez ou vous la décorez afin qu’elle ressemble à quelque chose de supportable - à un tel point qu'elle devient autre chose."
[Iris BJORNSDOTTIR]
Damien Hirst

Damien Hirst


L'étrange beauté des cadavres

Andres Serrano - photographies de cadavres à la morgue - 1991.

Andres Serrano, né le 15 août 1950 New York, est un photographe contemporain américain connu principalement pour ses photos et portraits de corps. En 1991, Andres Serrano réussit à s’introduire et à travailler au sein d’une morgue new-yorkaise. Il réalise alors la série photographique The Morgue.
Certaines images de la série sont très dures. Mais le fait qu’il ait rendu esthétique un sujet plutôt morbide nous donne une autre vision de la mort.
Il place presque toujours le corps devant un fond noir pour le sortir de son contexte. L’artiste respecte les modèles par des cadrages très serrés et l’utilisation de drapés afin de ne pas révéler l’identité des défunts. Le photographe nous montre alors la mort dans les détails. La lecture des titres entraîne une émotion supplémentaire. En effet, la mort est représentée de manière explicite à travers les photographies mais les intitulés nous horrifient (Sida, crash d’avion, Suicide). Andres Serrano s’inspire de l’iconologie chrétienne de la représentation et de la peinture du Memento Mori baroque. Il compose alors ses photographies de la même manière qu’une peinture. « J’utilise la photographie comme un peintre utilise sa toile »
[Morgane Boulet]
Andres Serrano - Autoportrait

Blood transfusion resulting in AIDS

Fatal Meningitis I

Knife to death III

Jane Doe killed by Police
Killed by Four Great Danes


Jouer avec la mort

Annette Messager - Installation, Gants tête, 1999

Annette Messager, artiste et plasticienne française, née en 1943 à Berck sur mer, ne cesse de ressasser son passé à travers ses différentes œuvres, y intégrant des évènements marquants de son enfance, des cauchemars qu’elle a pu subir pour ensuite les retranscrire en installation.
Son œuvre Gants-tête de 1999 en témoigne. Elle l’a présentée lors d’une exposition au musée Maillol à Paris courant 2010 qui s’intitulait « c’est la vie, vanités : de Caravage à Damien Hisrt ».
Elle y compose un « croquemitaine » ; un crâne qui se dessine grâce à des gants noirs (mitaines), transpercés de crayons de couleur, le tout installé sur un mur blanc. Cette image de la mort, pas vraiment terrifiante, renvoie effectivement aux terreurs enfantines.
Pour ma part, j’y vois l’humour, le côté ludique qu’il y a à traiter de la mort pour la désacraliser.
[Marion Fourré]
Installation, Gants tête, 1999, 178 x 133 cm Collection AM et M Robelin

Installation, Gants tête, 1999, 178 x 133 cm Collection AM et M Robelin

Jan Fabre, L’Oisillon de Dieu – 2000

Jan Fabre réalise la sculpture d’un crâne humain tenant un oiseau mort dans sa bouche à partir d’ailes de coléoptères et d’une perruche empaillée. Cette œuvre opposant la vie et la mort nous présente la vitalité habituelle de l’oiseau, aussi retranscrite par la couleur de ses plumes, face à la tête de mort, aux insectes et à leur couleur sombre. De plus, le crane forme un nuage d’insectes sortant et s’envolant du corps de l’oiseau, illustrant ainsi l’après, la décomposition et le retour à la vie. Le titre de l’œuvre évoque, pour moi, le fait que tout le monde est, tôt ou tard, frappé par la mort, même jeune en plein vol…
[Morgane THOMAS]
L'Oisillon de Dieu - 2000

Nicolas Rubinstein (crâne de Mickey)

Nicolas Rubinstein. Né le 21 avril 1964 à Paris. Il vit et travaille à Marseille.
La mort peut être détournée, moquée, désacralisée par l’Art, ou par Mickey, ou encore par Nicolas Rubinstein. C’est un clin d’œil que Rubinstein fait à l’Art ou à la mort, puisque cette pièce Sans Titre, reprend un crâne humain portant les attributs de Mickey (voir photo). On peut la voir comme une vanité. C'est également un pied de nez à l’icône du divertissement capitaliste ayant ici perdu sa vitalité légendaire. Un paradoxe qui n’est finalement pas si hasardeux puisque né sous le crayon de Walt Disney, Mickey a quelque chose d’humain qui dépasse la souris qu’elle prétend être, reprenant les postures, expressions et langage humain de manière exagérée.
Même si Mickey Mouse a plus de 86 ans, il reste dans notre imaginaire sans âge, éternellement jeune et vivant. Le présenter comme le fait Rubinstein est plutôt provocateur. Il le détourne de sa jeunesse et le détache du monde de l’enfance. Rubinstein nous donne la possibilité d’un nouveau regard, plus en profondeur et tout en légèreté. Il pose la question du “et si” après nous en avoir donné la réponse potache. Sa solution peut s’apparenter à l’art toys, figurines, sortes de “jouets” collector pour adultes qui usent des icônes de l’enfance en les disséquant, détournant, désaxant.
Après tout, cette sculpture se lit simplement, elle est parlante.
[Clément LEMIERE]
Nicolas Rubinstein - sans titre - 2000

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